Rudi Rosenberg a eu une idée que je n'hésiterai pas, tant je suis sorti du "Nouveau" enthousiaste, à qualifier de géniale : offrir au spectateur français un teen movie répondant parfaitement au cahier des charges établi par Hollywood depuis John Hughes (la problématique inclusion - exclusion, les tourments du premier amour, l'absence des adultes relégués au bord du cadre, les tendances trash - caca - pipi des blagues de collégien, et pour finir une certaine manière de se trouver soi-même au milieu de tous ces conflits) tout en suivant les glorieux modèles de François Truffaut ("l'argent de poche") et de Maurice Pialat ("Passe ton Bac..."). Et le résultat est stupéfiant : toutes les qualités du (bon) cinéma d'auteur français - une réalité tellement "juste" que quiconque a encore au fond de lui les doutes et les souffrances vécus lors de ses années-collège vivra le film comme un semi-cauchemar - avec beaucoup de franche rigolade. Le grand écart entre l'intelligence et la sensibilité d'un Kechiche par exemple et les bons délires de l'école Apatow, si l'on veut... bref, ce que Sattouf avait raté avec ses "Beaux Gosses"... La plupart des scènes de "gêne", "d'embarras" sont suffocantes - le début avec l'arrivée de la collégienne handicapée -, mais la véritable gloire du film est de refuser finalement toute illusion "feelgood" de revanche finale : la jolie suédoise préfère un beau mec à notre héros mal gaulé, les salopards continuent à avoir le pouvoir, et il n'y a aucune découverte merveilleuse d'une vocation insoupçonnée. La chorale du collège est bel et bien une souffrance pour les oreilles, mais on a fini quand même par grandir, en apprenant quelque chose sur la Vie. Oui, ce film a quelque chose d'un miracle. [Critique écrite en 2017]