Un regard toujours tourné vers l'histoire américaine, Malick nous transporte à l'orée du XVIIe siècle, dans le contexte de la colonisation britannique des terres d'Amérique du Nord, cadre d’une romance entre un capitaine anglais et une autochtone - Pocahontas - dans une ode méditative à la Nature. Les errances introspectives de La Ligne Rouge s'exacerbent ici, et s'abandonnent à cet environnement luxuriant primitif, théâtre de la cohabitation culturelle compliquée entre les indigènes (véritables Amérindiens) et les soldats explorateurs. Au service d’une vision, les acteurs excellent à mettre cette tragédie poétique en mouvement, dans un contraste entre la liberté des tribus natives, et l’enfermement omniprésent de la vie moderne. Sur cette version de près de 3h, la première heure envoûte dans son exotisme, puis l’œuvre trébuche un peu dans son déroulé d’images (axé sur la confrontation des peuples) ; ce qui est toutefois compensé par la beauté de la nature évocatrice, magnifiquement captée par Lubezki, et la grâce du montage, accordé à l’élégie musicale (Horner, Wagner, Mozart). Les sublimes séquences de navigation ravivent l’ambiance d’Aguirre, maitrisée cette fois-ci. Aucune scène ne semble superflue tant le cinéaste sait observer le moment pour laisser les silences s’exprimer et composer des plans émotionnels. Même si on ne concède pas à tout le fil narratif, et qu’il demande de la persévérance, Le Nouveau Monde possède une aura divine inoubliable et dont on ne peut se détourner.