Nanar de luxe

Voir Le Pacte des loups en 2021 c'est comme écouter de la tektonik. Un immense sentiment de malaise nous atteint quand on réalise à quel point une merde pareille a pu être populaire y'a une vingtaine d'années.

Ceci s'explique car Le Pacte des Loups est avant tout le fruit de son époque, un film post-matrix qui tente de mixer dans un gloubi-boulga indigeste (et surtout ridicule) une quantité incroyable de références "geek" allant de Tsui Hark aux jeux-vidéos (le tout dans une orgie de ralentis moches, évidemment).

Car oui, ce qu'a voulu faire Gans ici c'est un film qui incarnerait le "renouveau" du cinéma de genre français. Rien que ça ! Sauf que tel un Tarantino éco+, il ne nous propose rien d'autre qu'une superposition d'idées (douteuses) pompées ailleurs MAIS transposées dans un contexte historique français. Ici réside le premier problème : je suis désolé Christophe mais personne ne veut voir Mark Dacascos en pagne faire du Kung Fu pour botter le cul à des nobles auvergnats du XVIIIe siècle, et encore moins être témoin d'un Samuel Le Bihan vs Vincent Cassel avec des armes de Soul Calibur !

Et même en mettant de côté l'écriture saugrenue ou les acteurs en roue libre (mentions spéciales à Vincent Cassel qui cabotine un max, ou encore Jean Yanne qui est visiblement désespéré de jouer dans ce film), la réalisation et le montage sont affreux. Par quelle sorcellerie en est-on arrivé là ? Ce film (je vous jure que je peine à écrire ces lignes tant je me marre en y repensant) réussi l'exploit de foirer ses champs-contrechamps en insérant des fondus enchainés entre chaque plan (d'ailleurs le fondu enchainé doit être la transition la plus utilisée dans le film, même quand ça n'a aucun sens). Et ceci n'est qu'un exemple parmi un nombre incalculable de choses qui défient toutes les règles du langage cinématographique. Bien évidemment, les scènes d'action sont affreusement chorégraphiées et découpées, mais à ce stade on est plus à ça prêt.

Ce qui fait basculer le métrage du navet au nanar, c'est que malgré son postulat ridicule le film se prend au sérieux au point que ça en devienne hilarant. J'ai énormément de respect pour Christophe Gans, ce qu'il a fait en tant que distributeur pour le cinéma asiatique et sa reconnaissance en France est juste formidable. Mais de ce que j'ai vu, en tant que réalisateur ça va de moyen à immense ratage. Et justement, là c'est un immense ratage.

Le plus déprimant, c'est que finalement en vingt ans rien n'a changé. On se tape toujours des tentatives ratées de faire du "cinéma de genre" en France. Des films stériles trop conscients d'eux même, qui, au lieu d'innover, d'inventer une ambiance avec un folklore purement français, ne savent pas s'affranchir de leurs références américaines ou asiatiques. Malgré tout je préfère de loin la maladresse sincère mais généreuse d'un Gans plutôt que la posture intello aussi insupportable que décevante d'une Ducourneau.

Parce qu'au moins on rigole bien devant le Pacte des loups.