Qu'est-ce qui fait qu'un film est vraiment naze ?


Comment t'expliquer que dès le début, avec ce plan qui part du gueule du gars pour doucement montrer le Parrain, ça sent le moisi, et ça reste pourri pendant tout ce bordel de trois heures ?


Le Parrain, c'est un navet total.


Un film sur la testostérone et le vieux qui tire sa révérence, qui passe le témoin à des mecs qui pigent rien, et souvent se plantent. Un film sur le début d'un mec qui fait des films, du Nouvel Hollywood, d'un gars et d'un acteur, Al Pacino, quoi.


Un film sur la honte et la violence soft, filtrée par les règles d'un monde qui part en sucette lentement. Des scènes intimes à foison, en noir et blanc, qui montrent les coulisses du pouvoir, le drame des choix, et la montée en pression qui marque les traits. Les silences et les regards atteignent une intensité de ouf. Michael Corleone, c'est tout le contraire de Tony Montana, qu'il incarnera dix piges plus tard : issu d'une lignée, encastré dans une famille, plein de principes, cool et imperturbable. Un mec dont la naissance est une offre qu'il peut pas refuser. C'est un monde à la fois figé par la tradition sicilienne, catho, mafieuse, où les rites rythment la vie des gars (mariages, élections, distribution des rôles, enterrements...) et instable comme jamais. À chaque déplacement, tu flippes pour un assassinat, ça peut tomber à tout moment, et tu le crains tout le temps. Coppola, il te balance pas un film épique, un western déplacé chez les mafiosi. La durée, les silences, ça te met les frissons et t'as la fascination pour ces règles et cette violence.


L'image, c'est du lourd : son grain, ses dorures, ça a tout du polaroid classique. Des plans de ouf, comme celui où le gars pisse dans un champ pendant qu'on bute le passager de sa caisse. Au-dessus des blés qui bougent, la statue de la liberté, garante et spectatrice d'un monde qui part en vrille.


Parce que ce film, c'est aussi la fin d'un monde : Brando, dépassé, passe le relai en refusant de crever pour les gars qui veulent enterrer son époque. L'arrivée de la drogue, la légalisation des affaires, la mafia contre le capitalisme : c'est une histoire du XXe siècle portée par des gars qui sont vraiment des enfoirés, et le kif qu'ils procurent montre toute la dualité de la puissance du ciné. Un putain de film, en plus, c'est des moments où ça déchire la rétine pour longtemps. La séquence de ouf en montage alterné du baptême et de l'exécution des gros pontes. Mais aussi la mort du Parrain dans les plants de tomates, sous les rires d'un gamin. Le public et le perso, la gloire et la famille, les silences des vieux et les cris des gamins

AntiPepper
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le 28 déc. 2023

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