Canyon Passage
Il semble que ce western de Jacques Tourneur, tourné en 1946, soit un point clé dans la longue histoire du western américain. Le fait que le cinéaste soit un exilé comme Jacques Tourneur, comme cela...
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le 27 oct. 2024
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Il semble que ce western de Jacques Tourneur, tourné en 1946, soit un point clé dans la longue histoire du western américain. Le fait que le cinéaste soit un exilé comme Jacques Tourneur, comme cela avait été pour Fritz Lang ou Otto Preminger, n'est d'ailleurs pas neutre. "Canyon Passage" instille "le doute" dans le scénario là où il n'y avait, auparavant, que de "l'affirmation". Un exemple pourrait être la peur, le danger latent qu'inspire les tribus indiennes voisines. Les colons ne sont plus aussi sûrs d'eux lorsqu'ils entendent les indiens leur reprocher la possession des terres qui appartenaient à tout le monde dans un monde désormais passé.
Un autre exemple, c'est aussi le degré d'incertitude des différents personnages face à leur avenir ou leur présence. Les gens sont généralement des déracinés et ils n'ont pas forcément trouvé l'Eldorado : ils n'excluent pas de partir ailleurs refaire une nouvelle vie, sur d'autres bases.
En somme, le film est une espèce de chronique d'un village dans le sylvestre et verdoyant Oregon où il se passe toujours quelque chose que ce soit au niveau des affaires, reluisantes pour certains, en berne pour d'autres, les jalousies qui conduisent à quelques règlements de compte, les romances qui se font ou se défont … Contrairement à beaucoup de westerns (classiques), dans ce film de Jacques Tourneur, tout ne tourne pas autour d'un personnage principal. Au contraire, les personnages principaux (Dana Andrews, Susan Hayward) sont équilibrés par rapport à des personnages secondaires mieux mis en valeur. Un exemple, c'est Susan Hayward, l'habituelle flamboyante, qui ici est tout en retenue et qui n'en est que plus convaincante. Ou encore Dana Andrews qui a un comportement le plus souvent consensuel. On est beaucoup plus proche de Glenn Ford que de John Wayne.
Il en est de même sur les qualités des personnages où Tourneur est moins manichéen. Pas vraiment de bons ni de méchants. Le seul vrai méchant de service, rôle assuré par le fordien Ward Bond !, va commettre l'erreur de trop en tuant une squaw créant un soulèvement de la tribu. La communauté blanche se désolidarisera du personnage.
Il y a des séquences merveilleuses comme la construction sur la journée d'une maison pour de jeunes mariés par l'ensemble de la population qui s'achève par le feu allumé dans la cheminée, l'installation d'un fer à cheval au-dessus de la porte d'entrée et la bénédiction ad hoc … sans oublier les indiens qui viennent interrompre la fête – pacifiquement – et repartent avec un panier de victuailles. J'aime …
Et puis, ce personnage joué par un facétieux Hoagy Carmichael, chanteur et compositeur de son état, qui traverse le film de part en part, improvise des chansons, façon country, avec sa petite guitare sur l'évènement du moment, se mêle de tout, porte un œil indiscret ici et là. C'est l'élément stabilisateur de cette petite société en vase-clos. Un troubadour qui fait irrésistiblement penser aux chœurs antiques des tragédies grecques.
Oui, grand et beau western de Jacques Tourneur, son premier en technicolor …
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le 27 oct. 2024
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