Mossafer ou le passager
Voici un des 1er longs métrages de Kiarostami, en noir et blanc, rythmé par l’escapade d’un enfant que l’école ennuie, que les joutes de balles avec ses copains dans les ruelles de son village, lasse, comme d’entendre les litanies de sa mère et grand-mère…
Montrant jusqu’où roublardises, diverses ruses ou subterfuges pour réunir les fonds, le rêve de l’enfant vers Téhéran où se joue le match de foot… va devenir réalité… mais une réalité décalée de son attente…
Kiarostami déroule une dialectique assez linéaire centrée vers un défi paraissant hors d’atteinte, et d’haleine pour ce garçon désoeuvré et rebelle.
Il force un trait au début peu sympathique, le montrant indifférent à ses copains et famille, sans foi ni loi que celle de l’évasion vers un ailleurs, et une féérie dont son quotidien est dépourvu. L’épisode de l’arnaque de fausses photos pour gratter quelques sous, devant le regard médusé de son copain, prend une tonalité burlesque et concrétise la force de l’image et du rêve, devant une foule envoutée.
On retrouvera une autre foule plus loin, celle des longues files d'attente au stade.
Il y aura cette emprise que tisse le garçon autour de lui, que l'on retrouvera dans d’autres films du cinéaste (l'on pense au costume de mariage), de même que la déconstruction de la fin, où le rêve sans totalement s’accomplir conduit à une ouverture vers d’autres espaces, foules et rythmes… L’emprise aboutissant à une déprise, à une respiration en marge, celle des corps qui se laissent aller sur la pelouse, tandis que la rumeur du match s'estompe...