Pourquoi conjuguer l'avenir au présent ?

Le passé, c'est typiquement ce que l'exception culturelle française sait faire. Un nom mystérieux mais qui suggère immédiatement un drame, une histoire tourmentée et complexe, un petit budget et des enjeux personnels familiaux, un secret, des doutes, des remords et des regrets, cette infatigable impression de gâchis personnel, de choix avortés, de contraintes supérieures qui ont transformé des vies, les ont compressées jusqu'à les détruire, ne laissant que des coeurs ravagés sur le bord d'une route anonyme de banlieue, dans un logement de classe moyenne merdique, en cours de retape, fleurant bon le côté franchouille, provincial aux goûts archaïques, traditionnel.

Le cinéma français qu'incarne Le passé, c'est l'histoire de gens hors du monde mais contraints d'y vivre. Des âmes blessées et coupables qui cherchent la rédemption de leurs erreurs dans une acceptation de leur condition, remisant le matérialisme pour la vibration permanente d'un quotidien plein de traumatismes.

La caméra filme les longs silences gênants de ces gueules éperdues, dans des voitures tristes et bruyantes, des lieux froids et dépolis.
Tout le passé n'est pourtant qu'une mise en scène de cette succession de coïncidences graves qui s'accumulent lentement, annonciateurs d'une déchéance ultime.

Les acteurs s'en tirent honorablement, mention spéciale aux hommes, quel que soit leur âge, du plus ancien (Ahmad) jusqu'au gosse (Fouad), même si les jeunes filles (Lucie) s'en tirent pas mal. Seule Marie-Anne, interprétée par Bérénice Béjo agace, incapable de rendre authentique la moindre crise de larmes, la moindre phrase qu'elle prononce, faisant passer pour un récital de sixième sa partition mal écrite. Son jeu devient d'autant plus horripilant qu'elle n'est capable que d'une seule expression durant tout le film, construisant un personnage insupportable, détestable, tête à claques, méprisable.

C'est malheureusement autour d'elle que tourne le film, dans cette farandole de pas de bol dont le hasard (bienvenu) vient, au bout du compte, casser la monotonie. Deux heures dix qu'on croit achever bien longtemps avant la dernière image. Deux heures dix qui n'en finissent pas, pour aller on ne sait trop où jusqu'à ce que le ridicule l'emporte sur l'ennui, qui l'avait déjà emporté sur l'exaspération de ce personnage de mère porté à l'écran, imbitable, insupportable, et que tous les autres tentent de raccrocher comme ils peuvent à un semblant d'humanité.

Le cinéma français gagnerait à s'épargner des films à l'histoire et aux dialogues mal écrits, des caricatures permanentes, et des prétentions qui parviennent à gâcher la modestie d'une histoire familiale une peu brinquebalante mais touchante, soutenue par quelques acteurs exceptionnels de sincérité. Et après on nous accusera de sexisme.
hillson

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