J'étais très dubitatif lorsque j'ai appris que ce film allait se faire, encore plus lorsque j'ai vu le nom du réalisateur (et ce qu'il a commis) et j'ai été achevé lorsque j'ai appris qu'il y aurait un récit encadrant à l'histoire du Petit Prince. Et évidemment c'est mauvais. Le film est gangrené jusqu'à la moelle et contrairement à beaucoup d'autres je ne sauverai même pas les parties relatant l'histoire du petit prince avec un petit effet cartonné. Pourquoi ? Pas que visuellement ça n'ait pas un certain cachet (contrairement au reste), c'est que c'est trop.
C'est un film incroyablement vulgaire, extrêmement didactique, on t'expose la thèse du Petit Prince en long, en large et en travers, jusqu'à l’aliénation dans le récit encadrant, on te montre bien que les adultes c'est de la merde, que tout est pareil, qu'il faut travailler, pas rêver, que tout est automatisé, etc. Rien de neuf, mais surtout rien de subtil.
Alors au début je me suis demandé si le fait que la partie en 3D moche n'était pas faite exprès en 3D moche pour jouer sur le tableau du quotidien morne et celui de la beauté et de la rêverie avec l'autre partie en carton pâte. Peut-être, mais même, je trouve ça grossier, c'est tire-larme avec la petite musique, on t'explique pendant mille ans pourquoi c'est censé être triste, au lieu de tout simplement ressentir.
Et la partie en carton est trop courte, mais elle tranche trop avec le reste, ça fait vraiment : "oh regarde la poésie, vas-y regarde bouffe ma poésie, avale". Elle me fait un peu le même effet qu'une gorge profonde (enfin métaphoriquement je n'ai pas essayé), ça me donne la gerbe. Tout le film est assez gerbant.
Et en regardant le film j'ai réfléchi, on a un autre chef d'oeuvre de la littérature jeunesse qui est Max et les maximonstres qui a été adapté par un vrai réalisateur : Spike Jonze et qui non seulement s'est emparé des thématiques de l'album pour en faire un des plus beaux films sur l'enfance, ma a respecté aussi le texte de base (enfin parfois plus les images que le texte). Parce que non seulement pour le Petit Prince raconter l'histoire du Petit Prince aurait suffit, plutôt que de faire des coupes pour mettre en avant ce récit encadrant inutile et lourdingue... Mais surtout, pourquoi ne pas faire comme Jonze, c'est-à-dire étoffer, raconter des choses en plus sur l'enfance, sur le jeu, sur l'amitié. Au lieu de nous dire clairement avec des sabots "oui il va quitter le renard et ne jamais le revoir, mais ne pleure pas car la spiritualité et Dieu peuvent t'aider" (c'est exactement comme ça qu'il faut le prendre j'ai l'impression, lorsqu'on te parle du Petit Prince qui est partout, qui voit tout et qui est dans le ciel...).
J'imagine très bien mettre 20min de jeu avec le renard, au lieu d’amener cette histoire d'apprivoisement encore plus rapidement que dans le livre. C'était le moment de montrer de belles choses, la pâte artistique était là, c'était tout à fait possible de les voir juste jouer. Ou de voir pendant 10min dans le plus parfait silence le Petit Prince s'occuper de ramoner ses volcans (qu'on ne voit pas).
Tout ce qui aurait pu être bien est sacrifié sur l'autel du consensuel, d'une niaiserie (et pas naïveté) et finalement le film prend plus les gamins pour des abrutis que pour des gens capables de comprendre.
Aussi, le Petit Prince parle comme un adulte, c'est gênant, je ne sais plus si c'est le cas dans le bouquin, mais là ça fait vraiment mauvais film américain avec des dialoguistes qui n'ont jamais entendu parler un enfant.
Je ne parle pas de la dernière partie... plus qu'affligeante... Je parle de ce qui aurait pu être sauvé... Je ne vais pas m'étendre sur ces immondices.
Un film qui sacrifie donc la poésie, la beauté, la simplicité... pour faire un film familial de merde... Pas de doute... c'est de la merde.