James Donovan (Tom Hanks), avocat new-yorkais, se voit demander par le gouvernement de prendre la défense d'un espion russe, Rudolf Abel (Mark Relance, époustouflant), dans un procès d'où il doit sortir condamné à mort. Mais Donovan s'attache à Abel, et lui obtient un emprisonnement sans peine de mort, afin de l'échanger contre un pilote américain pris par les Russes (Austin Stowell). La CIA l'envoie effectuer les tractations à Berlin Et, mais apprenant qu'un jeune étudiant américain (Will Rogers) s'est lui aussi fait prendre du mauvais côté du Mur de Berlin, il décide de proposer Abel à la fois aux Soviets contre le pilote, et aux Allemands en échange de l'étudiant. Seulement, il est contraint de jouer d'autant plus serré que la CIA ne cautionne pas du tout son double jeu...


C'est peu dire que Spielberg m'avait déçu avec sa Liste de Schindler, dans laquelle il s'avérait incapable de faire vivre des personnages, écrasés par un scénario qui privilégiait l'histoire des événements au détriment de ses acteurs, et empêchait de ressentir la moindre émotion face à un récit sans enjeu et exposé de manière trop naïve. Avec Le Pont des espions, il nous propose l'exact inverse.
C'est en effet autour des personnages qu'il bâtit son intrigue, dressant au fur et à mesure du film le portrait d'une période historique, mais sans jamais y sacrifier ses protagonistes. Il faut dire que ceux-ci sont très finement écrits et introduits dans le récit, avec une remarquable absence de manichéisme, à laquelle ne nous avait pas habitué Spielberg, et qu'on est sans aucun doute en droit d'attribuer aux frères Coen, convoqués ici tout spécialement pour le scénario.
Outre une incroyable écriture, les personnages sont surtout parfaitement incarnés par de grands acteurs, particulièrement Tom Hanks, toujours aussi juste et poignant que d'habitude, et Mark Rylance, révélé par ce film, qui, en un seul film, parvient à se poser comme un immense acteur (il obtiendra d'ailleurs pour ce rôle un Oscar amplement mérité). C'est le talent de ces acteurs, allié à la grande subtilité d'écriture du scénario, qui permet de rendre si attachants les personnages et de faire appel directement à l'âme du spectateur.
Car c'est bien un film plein d'âme que nous offre Spielberg à travers cette histoire, qui lui permet de rappeler qu'au sein de chaque guerre, aussi froide soit-elle, on trouve des vies humaines, et que ce sont elles qui comptent avant tout, et qui doivent passer avant les intérêts d'un gouvernement parfois trop enclin à oublier la dimension humaine des guerres qu'il livre. Une superbe leçon délivrée avec une subtilité incroyable dans un récit très classique, mais parfaitement mis en scène (encore une superbe photographie de Janusz Kaminski, simple et efficace) et qui s'achève en une explosion émotionnelle aussi efficace qu'inattendue.
Avec Le Pont des espions, Spielberg montre donc qu'en plus d'être un grand réalisateur de blockbusters, il sait mettre en scène, quand il le veut, l'homme dans toutes ses facettes, glorieuses et moins glorieuses, de manière particulièrement juste. Mais il sait aussi montrer qu'à la fin, c'est toujours l'espoir qui l'emporte. Et c'est bien ce qui fait de ce Pont des espions un grand film !

Tonto
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Les meilleurs films avec Tom Hanks et Les meilleurs films de 2015

Créée

le 18 juin 2017

Critique lue 507 fois

14 j'aime

14 commentaires

Tonto

Écrit par

Critique lue 507 fois

14
14

D'autres avis sur Le Pont des espions

Le Pont des espions
guyness
6

L'Allemagne déleste

Il y a en fait deux films dans ce Pont des Espions, et le plus réussi des deux n'est pas celui auquel on pourrait penser. La première partie est, de fait, bien mieux qu'une simple mise en place...

le 9 févr. 2016

58 j'aime

24

Le Pont des espions
Docteur_Jivago
6

Bons baisers de Berlin

C'est toujours un petit évènement la sortie d'un film de Steven Spielberg, malgré un enchaînement de déceptions depuis une petite dizaine d'années (La Guerre des Mondes est à mes yeux son dernier...

le 31 déc. 2015

55 j'aime

20

Le Pont des espions
blig
9

L'espion qui venait du Droit

Un nouveau film de Steven Spielberg est toujours un évènement en soi. Quand en plus il met en scène Tom Hanks au cœur de l’échiquier de la Guerre Froide sur un scénario des frères Coen, c'est Noël...

Par

le 4 déc. 2015

53 j'aime

12

Du même critique

Solo - A Star Wars Story
Tonto
8

Mémoires d'un Han

Dans les méandres de la planète Corellia, où la population a été asservie aux ordres de l’Aube écarlate, organisation au service de l’Empire, un jeune homme, Han (Alden Ehrenreich) tente de s’évader...

le 24 mai 2018

79 j'aime

32

Hostiles
Tonto
9

La fantastique chevauchée

1892, Nouveau-Mexique. Vétéran respecté de l’armée américaine, le capitaine Joseph Blocker (Christian Bale) se voit donner l’ordre de raccompagner le chef cheyenne Yellow Hawk (Wes Studi), en train...

le 20 mars 2018

78 j'aime

15