Il y a surement, au début, l'esquisse du défaut majeur des premiers films des grands cinéastes, ce côté volontariste et appuyé du discours. Du moins pendant la première partie. Après, le film s'en va. Mais vraiment. C'est très beau, et ça restera magnifique jusqu'à la fin. Je dirai même que de ce point de vue, il dépasse largement Saint Laurent, parce que c'est un film plus petit, moins contraint. Du didactisme du début (chaque plan à un sens bien précis, se reporte au sujet au lieu de creuser vers autre chose) Bonello filme une fuite, un mystère vivant et mobile qu'est Jean-Pierre Léaud. Aucun film avec Léaud ne peut être totalement immobile. Parce qu'il y a quelque chose en lui qui fait sentir le mystère, le goût de l'ailleurs, la tentation du souvenir et des fantasmes d'autres monde. Ses yeux creusés et brillants sont une promesse d'échappatoire, les faussetés de son jeu ne résonnent avec rien d'autres que l'humain. Faire jouer Léaud, c'est ouvrir son film à la fuite et donc à l'enfance, c'est la porte ouverte pour un film sans volontarisme. Ce n'est pas un film sur un pornographe, mais le récit d'un homme qui cherche, qui a toujours cherché, qui retrouve son fils et sent le poids des années. Avec cette chose simple et déchirante : Léaud qui construit tout seul sa maison sur un petit terrain d'herbe verte. Et cette voix, toujours particulière, toujours hantée des plus beaux fantômes de cinéma : "Dans mes films, vous pouvez toujours aboutir à quelques secondes de beauté même si vous trouvez que le reste est complètement obscène. Parce que c'est du sexe à l'état pur, et que par conséquent il y a là quelque chose d'humain."