Malgré un rythme parfois chaotique et des lenteurs pas forcément justifiées, ce céphalopode me plait quand même beaucoup. Porté par un Daroussin parfait et une ribambelle de seconds rôles, de gueules (Pedro, Thomas « l’écrivain » écossais entre autres), le film déroule son intrigue de manière tout à fait plaisante, oscillant entre le polar noir et les répliques audiardesques.
Dans un environnement socialement cataclysmique, à cheval entre Saint-Nazaire et la France profonde, le poulpe se ballade chez les miséreux dans cette bonne ville d’Angernaud.
Le film est fondamentalement imparfait puisqu’une fois de plus le rythme n’est pas toujours au rendez-vous, mais les quelques moments de gloire, qu’ils mettent en scène le « casse-cuille » de service Gabriel Lecouvreur dit le Poulpe, avec Cheryl, Pedro ou Thomas ou bien les deux ou trois allumés dégueulasses de la France propre de Marie-Jeanne Desanges sont généralement drôles et bien écrits.
Il règne de plus une bonne humeur entre naïveté et cynisme plutôt communicative, depuis les scènes intimes du couple Poulpe/Chéryl aux apparitions du potentat local Nicolas L’Esprit, qui en disent plus sur les maux qui touchent la France et les turpitudes de ses élites que bien des œuvres dont c’est le sujet.
Alors on m’objectera que la recherche de la punch-line est parfois caricaturale et que le film souffre d’une certaine torpeur par moment, mais le plaisir que j’ai pris à regarder évoluer tout ce petit monde est certain.
Le film n’est d’ailleurs pas, je le répète, qu’une accumulation de scénettes, accumulant des lignes de dialogues absconses ou drolatiques. Il y a une vraie histoire, des moments extrêmement sombres, et le film trouve justement son équilibre dans l’alternance de ces passages vraiment drôles, même si le rire est souvent jaune, et le polar politique noir qui se dégage en filigrane.
Et puis que les choses soient claires, un film contenant des phrases aussi magiques que « pour reboire un coup avec lui il me faudra une paille de 10 kilomètres » ou « vous avez déjà sucé un militaire ? -Non. -Alors vous ne connaissez rien à l’amour » ou pour finir « vous seriez pas flic, par hasard ? –Non. –Tant mieux… on est jamais flic par hasard » mérite le respect.