"Le poulpe" à la base est une série de petits romans écrits par divers auteurs inspirés d'un auteur très connu de Série Noire, Jean-Baptiste Pouy. J'en avais lu, il y a pas mal d'années, un épisode. Autant que je me souvienne, le héros, surnommé le Poulpe, était un gars un peu free-lance qui s'impliquait dans une enquête sur un sujet qui n'intéressait pas la justice ni finalement la société. Son but était, en quelque sorte, de mettre au jour une affaire un peu pourrie avant de la remettre, une fois résolue, dans les mains de la justice.
Le film de Guillaume Nicloux est un peu dans ce genre-là : au départ, il y a une affaire de tombes pillées qui se transforme peu à peu en un sombre trafic de main d'œuvre immigrée. Mais le sujet finalement pas très clair n'est qu'un prétexte pour introduire des personnages tous plus tordus et pourris les uns que les autres, pervers ou politiquement extrémistes ou piliers de bistrots. On pourrait dire aussi que c'est un polar décalé ou déjanté ou désaxé : peut-être même frappadingue !
Le film est censé se passer dans une ville imaginaire mais on reconnait sans peine la ville de Saint-Nazaire avec les "hangars" à sous-marins, le port, la gare (assez particulière) ou encore le pont qui enjambe l'estuaire.
Dans la mouvance de pas mal de films des années 90, la photographie est très travaillée avec des couleurs qui flashent, des images ou des portraits à la fois sordides et très esthétiques.
Pareil pour la bande -son qui a des tons de hard-rock un peu ultime genre punk.
Le Poulpe c'est Jean-Pierre Darroussin dans un rôle là aussi très décalé, taiseux et teigneux. Et quand il ne se tait pas, c'est pour sortir des aphorismes qui sont devenus un peu cultes comme :
"A force d'enculer les poules, on finit par casser des œufs". Bref, tout dans la finesse.
Mais Darroussin n'est pas seul. Il est accompagné de sa copine Cheryl, interprétée par Clotilde Courau. Alors, là on tape carrément dans un des intérêts majeurs du film. Car la copine est un peu nymphomane, nécessitant du petit père Darroussin de la performance. Le spectateur, gourmand et intéressé par la plastique de Clotilde Courau, peut la voir sous toutes les coutures et dans toutes les positions. C'est, comme qui dirait, la prime … Un des intérêts, aussi, ce sont les sapes plutôt dans le genre serré et flashy qu'elle met. Par exemple, un beau tee-shirt orné d'une grosse pipe…
Jusque-là, j'ai énuméré les points saillants et positifs du film.
Si on se fout complètement de l'histoire, à ce niveau, on peut dire que c'est un vraiment très bon film.
Seulement voilà, après mon avalanche de compliments, je dois dire que je suis un peu resté sur ma faim en termes d'aventure ou de polar. Et puis voir des soulots ou des clodos - même esthétiques - à longueur de pellicule, j'avoue que je finis par fatiguer.
Au final, c'est un polar sûrement très intelligent pour lequel Clotilde Courau présente un intérêt non négligeable ! C'est un polar indéniablement esthétique voire esthétisant. Mais malheureusement c'est un polar qui ne m'a pas passionné car on passe d'une scène à l'autre sans qu'aucun élément de suspense vienne activer l'intérêt du spectateur (qui, il faut bien dire, ne comprend pas tout ce qu'il se passe) …
Pour finir de manière intelligente et éclairée, je vous en laisse une dernière pour la route :
- Vous seriez pas… flic par hasard ?
- Non !
- Tant mieux parce qu’on est jamais flic par hasard.