Un de ces films pour lequel on se dit "mouibofmouais" avant d'enfourner la galette dans son lecteur glouton, et qui met une gentille petite gifle d'autant plus résonnante qu'on ne s'y attendait pas du tout.
Il faut dire qu'avec un Illusionniste bien moisi en concurrent officiel, on se dit qu'on va se taper un duel Gérard Majax vs Sylvain Mirouf bien cheap, avec effets spéciaux minables et intrigue à la vas-y comme je suis plus balèze que toi pour tordre les cuillères et sortir un lapin de mon chapeau.
Le Prestige n'est rien de tout ça, même si l'adversité et l'animosité entre deux prestidigitateurs est bien au coeur de l'histoire. C'est un film fascinant sur l'art du faux semblant, de la perspective, des mensonges proféré par tout spectacle et donc toute oeuvre d'art, des limites que l'on est prêt à franchir pour divertir - et en ces temps de télé réalité et autres docu-reportages-fictionnisés où le moindre fait divers est mis en scène comme un épisode des Experts, ça fait forcément mouche. Une mise en abîme assez jouissive du cinéma, réalisée avec beaucoup de classe par un Nolan qui n'est décidément jamais aussi intéressant que quand il met les doigts dans les mécaniques qui construisent la narration et donc le spectacle. Le prestige de son film, ça n'est pas tant le coup de théâtre final, qu'on voit venir à plusieurs kilomètres, c'est plutôt la fabrication de celui-ci, qui ne sert qu'à détourner le spectateur d'une autre révélation, d'un autre tour de magie.
Le film a ses petites faiblesses, une Scarlett un peu bovine qui ne retrouvera décidément jamais la grâce de Lost in Translation (un heureux accident, il faut croire), un twist final asyntropé et quelques rebondissements que l'on voit donc gentiment arriver, quelques saynètes domestiques un peu passables, mais le Prestige est décidément une oeuvre captivante, intelligente, très joliment mise en image, et plutôt bien interprétée, même si le gimmick du Bale qui serre les dents pour montrer sa colère commence à me courir un peu sur le haricot.
A découvrir.