Bon, faisons court, mais bref.

Passons sur la déception de ne pas voir un "vrai" Alien mais un film aux liens très ténus. Soit. Passons sur la joie de voir un film de SF "adulte", en tout cas qui cherche autre chose que les explosions et les piou piou des rayons lasers. Ca fait du bien.

Mais il y a des choses sur lesquelles je ne peux pas passer.

D'une, le je m'en-foutisme d'un scénario qui va partout sans jamais aller nulle part, qui ouvre des portes, passe à autre chose, aidé par un montage de merde qui rend le film parfois incohérent, en tout cas pénible à suivre. Cela donne l'impression désagréable d'une accumulation de saynètes souvent sans aucun lien les unes avec les autres, arrivant comme un cheveu sur la soupe, comme une compilation d'idées nées d'une séance de brainstorming fumeuse. Je ne sais pas si les scénaristes étaient de grands débutants ou si Scott s'est fâché avec ses producteurs et si on nous fera le coup de la "ultimate director's cut" dans 20 ans pour mieux nous revendre le film, mais d'avance : fuck you.

Comment passer aussi sur ces moments d'une débilité profondes, que cela soit le rapport de Shaw avec la foi (et son putain de crucifix), les motivations ahurissantes des personnages, les réactions à côté de la plaque, sans parler des moments issus du pire du blockbuster ricain. Je ne veux pas vous spoiler la fin, mais sans déconner, je crois que je n'avais pas vu aussi con depuis Armageddon.

On sauvera bien sûr Michael Fassbender, le mec qui arriverait à rendre la lecture d'un roman de Marc Lévy passionnante, et qui hérite du personnage le plus intéressant du film. On enrage bien sûr en imaginant ce qu'un scénariste doué aurait pu faire d'un sujet aussi fascinant, au sens double du terme (le personnage comme ce qu'il sous-tend), mais ça sera pour un autre film. La thématique s'y prêtait pourtant à merveille (la créature qui rencontre son créateur, le don de la vie, etc), mais Prometheus n'en fait strictement rien, évidemment.

C'est tellement plus intéressant de nous inventer un personnage de vieillard omnipotent (Guy Pearce, maquillé n'importe comment alors qu'un acteur du bon âge aurait tellement mieux fait l'affaire) qui ira vers sa mort comme une merde, et n'apportera strictement rien au film. Oh really ? Pire, aucun des personnages, sortis de David (Fassbender, donc), n'existe. Rien. Aucune empathie. Des coquilles vides, des objets, des pantins, là où le même Scott dans le premier Alien (avec de vrais scénaristes et de bons "character actors", certes) nous rendait ses héros sympathiques, attachants, humains, en 3 phrases à peine.

L'échec est donc quasi total. Aucune piste n'est exploitée, le film ne va nulle part, et les liens avec Alien sont risibles. Mais ça, on s'y attendait presque. J'espérais au mieux un film de SF contemporain au ton adulte voire - rêvons - philosophique, au pire un gentil divertissement qui en mette plein la gueule. Prometheus n'est ni l'un ni l'autre. Lancer des pistes, cultiver le mystère : très bien. Mais de mystère ici il n'y a point. Ce ne sont que péripéties débiles après péripéties débiles, twists éventés et moments où tu regardes tes voisins de salle, embarrassé.

Et surtout Prometheus est une oeuvre bâtarde, scénarisée et montée n'importe comment. Ca n'est pourtant ni un premier film, ni un film indépendant : difficile alors de lui trouver des circonstances atténuantes, surtout quand on voit le budget, les moyens, et le talent potentiel derrière la caméra. Certes, Scott n'est plus l'ombre de lui même depuis des années, et si le monsieur a encore du savoir faire, il n'est plus le seul sur ce terrain. Quand on voit ce qu'un Ducan Jones ou un Alfonso Cuaron (par exemple) peuvent faire avec ô combien moins de budget, on a un peu envie de se foutre de sa gueule.

Alors oui, il y a de jolies images, des moments intéressants (le générique fait espérer, vraiment), des décors qui mettent le paquet. Mais ça, c'est le cahier des charges minimum pour un film à millions de dollars. Et ça ne sauvera pas Prometheus du crash, pas avec ce scénario aussi mal écrit, ces moments aussi imbéciles, ces personnages aussi creux, et cette musique aussi insipide.

Bien plus qu'une déception relative aux excellentes bandes-annonces et aux espoirs de voir le tout se lier intelligemment à la série Alien, on tient là un vrai grand film médiocre. Dans toute sa splendeur.

Au passage, si quelqu'un a compris à quoi sert Charlize Theron, à part pour justifier le quota bonnasse, qu'il me le dise. Elle a à peu près autant d'utilité que la 3D, c'est dire.
Prodigy
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le 3 juin 2012

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