Le Prince d'Egypte, ce chef-d'oeuvre d'animation.
Par où commencer ?
Par le cran que les studios DreamWorks ont eu d'adapter un passage biblique (!) sans prendre trop de gants: la mort d'enfants ainsi que le calvaire que vivaient les esclaves hébreux n'ont pas été édulcorés. Le passage de l'Ange de la Mort (quel nom déjà!) est glaçant. Celui des Plaies d'Egypte accompagné par le chant antinomique de Moïse et Ramsès, angoissant.
La beauté et la force de ce film d'animation repose ainsi sur son sujet: la religion. On retiendra la scène du Buisson Ardent, transcendante par sa beauté.
Contrairement à beaucoup de productions DreamWorks, il ne mise pas sur l'humour mais sur le spirituel et les relations humaines. Le passage où Moïse fait sa traversée du désert symbolise ainsi une quête métaphorique d'identité suite à une perte de repère. Néanmoins, le fait d'ajouter des passages comiques pour alléger le côté dramatique de l'histoire fait l'effet d'un cheveu dans la soupe et c'est l'un des rares points faibles que je lui trouve.
La mise en scène est tout simplement magistrale, ainsi que les décors qui retranscrivent la toute beauté de l'Egypte Antique. Les jeux de proportions soulevant la grandiloquente majestuosite du palais sont superbes.
Et que dire de la BO à part que Hans Zimmer a encore fait un excellent travail, j'ai des frissons à chaque fois que j'écoute Délivre-nous et les quelques bribes de chansons en hébreu. La très belle chanson sur la foi parlera à tout le monde car il est question d'espérance et d'optimisme avant tout. À travers le regard divin quant à elle donne une très jolie morale sur l'humilité et la bienveillance à avoir lorsqu'on porte un jugement sur soi.
Les personnages ne sont pas aussi manichéens qu'on pourrait le croire. Ramsès suit l'idéologie son défunt père afin de poursuivre son oeuvre, il n'est pas mauvais de nature.
Outre la problématique de l'adoption et de la recherche d'identité (très bien illustrée par la chanson Tout ce que j'ai toujours Souhaité, où Moïse tente de se rassurer), la question du poids de l'héritage et du devoir envers sa famille et son peuple est en effet un thème important du long-métrage, Moïse étant constamment tiraillé entre son frère et le peuple pour lequel il a été proclamé guide salvateur et libérateur.
Les Égyptiens ne sont également pas montrés comme tous mauvais, comme les Hébreux ne sont pas forcément tous bons et exempts de sentiments violents (ils lynchent Moïse en lui jetant de la boue au visage).
Qui plus est, Ramsès perd son fils et une superbe scène est dédiée à cette thématique...où l'on voit Moïse tout bonnement craquer et éclater en sanglots en sortant de la pièce: son Dieu ne serait donc pas si bon que ça et les ennemis désignés restent des êtres humains doués de sensibilité.
(Et dîtes moi si je me trompe mais il me semble que montrer explicitement le corps sans vie d'un enfant est extrêmement rare en animation)
J'aime le fait qu'il y ait une vraie complicité entre Moïse et Ramsès malgré ce qui les sépare, le film propose une vision intéressante d'une relation fraternelle vouée à une issue dramatique. Ramsès hurlant le nom de son frère à la toute fin donne des frissons.
Un des meilleurs films d'animation jamais réalisés jusqu’alors et je ne me lasserai jamais de le voir.
Une pépite comme on en voit que trop rarement.