Natacha accumule les galères. Fauchée comme les blés, elle se fait virer de son emploi de serveuse.
Elle doit plusieurs mois de loyer à son propriétaire, elle n'a plus ni chauffage ni eau chaude, sa chaudière est HS, et Enzo, son fils de 8 ans qu'elle avait laissé chez sa mère pour vivre une histoire d'amour sans lendemain, craint qu'elle ne l'abandonne à nouveau. Elle lui promet que ça n'arrivera plus et bien qu'elle passe ses journées à chercher du travail, elle ne trouve aucune solution.
De son côté Walid, un jeune migrant irakien attend dans la "jungle de Calais" de trouver la somme suffisante pour passer en Angleterre. Natacha accepte qu'il vienne prendre une douche chez elle contre 10 €uros. Elle découvre alors que les tarifs des "passeurs" clandestins sont indécents mais une telle somme lui permettrait de s'offrir une nouvelle chaudière. Malgré la réticence de Walid qui essaie de la dissuader, elle propose de faire passer des clandestins en les cachant dans le coffre de sa voiture pour une somme bien inférieure. Elle n'exige pas plus que le prix de sa chaudière. Le premier passage se passe bien, Natacha et Walid tous deux aux abois s'associent pour continuer ce commerce. Il cherche les clients, elle les fait passer dans sa voiture.
Excellente idée d'avoir choisir Alice Isaaz pour la mettre au volant de cette Dacia et nous faire trembler avec elle chaque fois qu'elle passe la frontière pour prendre le ferry avec son dangereux chargement. A aucun moment elle ne s'interroge sur la moralité de ce qu'elle accomplit. Soutirer de l'argent à des personnes dans une situation désespérée est critiquable mais pour elle dont la situation financière est également extrême le deal est équitable.
Côté migrant, si le réalisateur a choisi en la personne d'Adam Bessa, vraiment très bien, le plus doux, le plus gentil, le plus cultivé des migrants, il n'élude pas pour autant le quotidien lamentable de ces personnes venues du bout du monde pour se retrouver encore plus misérables, en France, au bord de la mer... Aucun angélisme et aucun sentimentalisme. Ces hommes et ces femmes sont prêts à tout pour traverser et ne discutent pas le prix. Ils ne sont parfois pas tendres entre eux et certains s'arrogent le droit de les racketter pour le moindre achat. D'où qu'on se place, le danger est permanent. Le réalisateur maintient une tension et un suspense qui donnent parfois les mains moites lorsque Natacha arrive à la frontière notamment. Il n'assène pas de leçon de morale. Il raconte une histoire réaliste, terrible, il observe et nous donne à voir et à s'interroger. Et ne conclut pas le film comme on pouvait le craindre...