On pouvait craindre un panégyrique de méthodes pédagogiques aussi révolutionnaires que spectaculaires, sur fond de poncifs et d'images prévisibles. Sous la houlette du réalisateur brésilien Sérgio Machado, ce "Professeur de violon" nous offre une tout autre expérience, humaine, cinématographique, musicale.


Les méthodes pédagogiques sont certes exposées, mais elles ne sont rien d'autre que très classiques, invitant ces élèves de la favéla de São Paulo auxquels elles s'adressent à adopter une rigueur et une discipline qui les arrachent à leur comportement initial.


La grande habileté de ce film consiste sûrement à ne pas avoir fait de l'enseignant un battant, à qui tout réussirait de prime abord et qui entraînerait tout sur son passage dans cette spirale du succès. Au contraire : on le voit douter, être paralysé par ses démons, renoncer devant l'obstacle. Ainsi, lorsqu'il va lutter, d'abord contre puis avec ses élèves, pour les arracher à la vie terne et sordide qui les guette, on saura que c'est aussi la face la plus inavouable de lui-même qu'il va tenter de sauver en eux, ce qui rend son entreprise bouleversante.


Le scénario évite ensuite le syndrome du pélican, qui pousserait l'enseignant passionné à se sacrifier pour ses élèves. L'entreprise de sauvetage de l'autre va ainsi pouvoir ricocher vers lui et le rendre apte à se sauver lui-même également. Alors pourra s'épanouir comme une superbe fleur tropicale l'incroyable charisme qui émane de l'acteur incarnant ce Laerte, Lazaro Ramos. Une fois le lien de confiance et de promesse établi avec ses élèves et en lui-même, les gestes de direction de ce professeur de violon pourront se faire infiniment délicats et subtils, aussi doux qu'une caresse. Ils ne pourront malheureusement neutraliser radicalement la violence électrique produite par la favéla, mais le spectateur sortira néanmoins de cette séance de cinéma traversé et empli d'une incommensurable douceur, imprégné d'un optimisme tenant tête à tous les abandons.

AnneSchneider
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le 22 juin 2016

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Anne Schneider

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