Il aura fallu attendre le quatrième opus de la saga Dirty Harry pour voir Clint Eastwood prendre le relais derrière la caméra, souhaitant revenir vers un esprit proche de celui qui l'amorça, Don Siegel, au passage l'une de ses plus grandes influences, avec qui il a aussi collaboré à plusieurs reprises.
Et on peut le dire, avec Sudden impact il est bel et bien de retour, et fait, plus que jamais, briller la flamme de cette remarquable saga. Reprenant le rôle d'Harry Callahan, il doit ici faire face à une vague de meurtres, s'appuyant sur un scénario aussi simplement qu'efficacement écrit, mettant en avant une intrigue passionnante. Le film repose à nouveau sur les épaules d'Harry, flic violent, vieux jeu et s'appuyant avant tout sur ses propres lois, avec ici une légère touche d'humour supplémentaire, ainsi que, comme toujours, de cinglantes et mémorables punchlines, à l'image d'un bon vieux Go Ahead, Make my Day ! face à un truand ayant un otage.
Ces années-là ne sont pas les meilleures pour Clint, devant d'abord faire face à quelques critiques vis-à-vis de ses idées politiques, mais aussi par rapport au cinéma. Il alterne alors entre projets personnels (les géniaux Josey Wales ou Honkytonk man) et films commerciaux (L'épreuve de Force, Firefox...), utilisant ces derniers pour financer les premiers. Si ce quatrième opus fait plutôt partie de la seconde catégorie, il parvient à y mêler une vraie touche personnelle, tout en prenant son temps pour bien mettre en place les enjeux et dresser de passionnants portraits de personnages, à commencer par le sien et celui de Jennifer Spencer, dont l'évolution et les motivations sont aussi intrigantes que passionnantes.
Si la subtilité n'est pas forcément de sortie, ce n'est pas dérangeant, au contraire même, tandis que si, du premier coup d’œil, il y a un fort aspect conservateur, plusieurs détails tendent vers un autre degré de lecture, à l'image de la vision de la police ou du flic vieillissant avec son chien. La mise en scène est d'abord efficace, puis plus subtile, avec la mise en place d'une ambiance prenante, parfois nocturne mais aussi mystérieuse, alors que les séquences d'action sont bien exécutées. Le rythme est maîtrisé, alors que la tension et le suspense sont présents, tout comme de nombreuses bonnes idées, à commencer par la mise en scène des souvenirs aussi glaçants que meurtris.
Il met aussi en place un choc de génération, lui symbolisant la vieille garde face aux nouvelles mentalités des années 1980. Lorgnant parfois vers Hitchcock, notamment dans sa description et mise en scène de la tueuse, il se montre vraiment habile pour créer une alchimie et tension entre tous les éléments. Il sublime le cadre qu'il a à sa disposition, notamment ceux de la nuit et de la côte portuaire, tandis que les quelques touches d'humour marchent bien et que la bande-originale colle parfaitement aux images. Enfin, Clint dirige parfaitement ses comédiens, tant lui-même, dans un rôle qu'il maîtrise à merveille, que sa femme d'alors Sondra Locke dans la peau d'un personnage tourmenté ou tous les autres, de parfaites gueules de l'emploi comme en témoigne Pat Hingle.
Quatrième opus de la saga Dirty Harry, Sudden impact permet à Clint Eastwood de passer derrière la caméra pour mettre en scène un polar nerveux, intense et passionnant, où il se montre à son aise pour créer une atmosphère intrigante et nocturne ainsi que de personnages ambigus et fascinants.