Le piège des femmes
Premier film que je vois du critique Alexandre Astruc (je crois que je vais essayer de voir l’Éducation sentimentale) et c'est pas si mal. Je dois même dire que j'ai adoré la première moitié du film...
Par
le 30 sept. 2018
Leur fille ! Il était impossible d’être moins la fille de gens comme eux que cette fille-là! Non pas que les plus belles filles du monde ne peuvent naître de toute espèce de gens. J’en ai connu… et vous aussi, n’est-ce pas ? Physiologiquement, l’être le plus laid peut produire l’être le plus beau. Mais elle ! Entre elle et eux, il y avait l’abîme d’une race.
C'est ainsi que s"exprime le Vicomte de Brassard alors jeune sous-lieutenant, découvrant stupéfait, une créature de rêve au regard étrangement lointain, à l'expression souverainement impassible: Albertine, la fille du vieux couple gris et lisse chez qui le jeune homme a pris pension.
Le Rideau cramoisi, paru en 1874, est la toute première nouvelle du recueil Les Diaboliques, qui en comprend six, de Jules Barbey d'Aurevilly, lequel influencé par Baudelaire et Byron s'inscrit dans le courant très prisé à l'époque du satanisme.
Alexandre Astruc a su adapter, de façon littérale et littéraire cette première nouvelle sur la passion qui couve sous la glace, brûlante, excessive et vorace, dans laquelle une femme, insensible en apparence se perd corps et âme dans la passion la plus totale et la plus ardente, sphynx le jour, maîtresse exaltée la nuit dans la chambre au rideau cramoisi.
Anouk Aimée, belle, distante et suprêmement mystérieuse fascine par son regard lointain, ses silences et ce feu qui la brûle tandis qu'Infante inaccessible, c'est elle qui sous la table, saisit avec passion la main du jeune homme, troublé, en proie à un désir lancinant pour cette fille énigmatique, statue vivante qui se donne mais ne se livre pas, dans une frénésie muette et silencieuse.
Un film où tous les commentaires sont en voix off mais qui par son esthétique baroque, son traitement des ombres et des lumières et le jeu des acteurs, brûle de passion.
Albertine la Pudica incarne le mystère d'un bout à l'autre, subjugue par sa beauté, créature hautement sensuelle qui pourrait être l'auxiliaire du Démon, le jeune officier pris dans ses rets.
d'Aurevilly déclarait à propos de ses nouvelles :
il y a dans ce qu'on appelle le Plaisir avec trop de mépris peut-être, des abîmes tout aussi profonds que l'amour", un amour destructeur qui donne la mort.
Une adaptation que j'ai trouvée réussie par le trouble qu'elle suscite, dû au jeu intense et tout en finesse du couple Aimée / Pascal qui soulèvent un coin de ce rideau sans toutefois en lever le mystère: tout le charme de cette nouvelle et de son adaptation.
Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Ces titres qui me font rêver, L'image du dandy au cinéma, Belles, belles, belles ! et La Rochelle ma belle, juillet 2012
Créée
le 28 juil. 2012
Modifiée
le 30 juil. 2012
Critique lue 1.5K fois
27 j'aime
25 commentaires
D'autres avis sur Le Rideau cramoisi
Premier film que je vois du critique Alexandre Astruc (je crois que je vais essayer de voir l’Éducation sentimentale) et c'est pas si mal. Je dois même dire que j'ai adoré la première moitié du film...
Par
le 30 sept. 2018
Les débuts du très littéraire Alexandre Astruc dans une adaptation d'une nouvelle de Barbey d'Aurevilly. Prix Louis Delluc 1952. Un moyen-métrage sans paroles dont l'histoire est racontée en voix...
le 5 août 2019
Les nouvelles de Barbey d’Aurevilly sont réunies dans un recueil par lequel on aborde le plus souvent son œuvre, les Diaboliques. Auteur majeur de la littérature française du XIXe, Jules Barbey...
Par
le 11 juil. 2013
Du même critique
L’Homme est incapable d’être honnête avec lui-même. Il est incapable de parler honnêtement de lui-même sans embellir le tableau." Vérité et réalité s'affrontent dans une oeuvre tout en clair...
Par
le 30 oct. 2012
424 j'aime
145
Dans l'éclat de l'aurore lisse, De quels feux tu m'as enflammé, O mon printemps, mon bien-aimé, Avec mille et mille délices! Je sens affluer à mon cœur Cette sensation suprême de ton éternelle...
Par
le 23 févr. 2018
372 j'aime
278
J'avais beaucoup aimé Marie-Antoinette de Sofia Coppola, j'ai regardé sur Arte, Virgin Suicides, son premier film qui date de 1999, véritable réussite s'il en est. De superbes images pour illustrer...
Par
le 30 sept. 2011
362 j'aime
114