Le Robot sauvage
7.6
Le Robot sauvage

Long-métrage d'animation de Chris Sanders (2024)

Le temps passe, les enfants grandissent. Il y a quelques années encore, j’étais, en tant que père accompagnateur, le spectateur de bien des productions destinées au jeune public. J’ai vu de nombreux films d’animation, puis l’âge d’or des Marvel, avec plus ou moins de bonne volonté. Débarrassé de ces derniers avec un véritable soulagement, il m’arrive encore de me questionner sur ce que l’animation a encore à proposer, quitte à inverser les rôles en pressant mes ados pour aller voir des films qui ne les intéressent a priori plus.


Et force est de constater que l’offre est encore vivace. Alors que sort en salle l’audacieux Flow, Le Robot Sauvage, encore sur les écrans, prouve que les grands studios peuvent eux aussi proposer des œuvres enthousiasmantes. Parce que le film offre un nouvel univers, dégagé de toute franchise (même si son succès en ouvre forcément une nouvelle), et qu’il est toujours grisant de se voir propulsé dans un nouvel environnement. Ce dernier, une planète clone de la terre, mais qui aurait eu la bonne idée de ne pas laisser y prospérer l’homme, pourrait se présenter comme un Eden naturel, où les animaux de la forêt vivent au rythme des saisons avant l’arrivée d’un robot perdu, pour une robinsonnade revisitée.


Car c’est bien là la réussite du film : reprendre les tropes du conte (récit initiatique, ode à l’effort et l’entraide, éloge de l’amour) en les détournant toujours suffisamment pour éveiller l’intérêt et renouveler l’émotion. Le robot, esclave programmé pour aider, devra redéfinir son conditionnement pour s’ouvrir à une véritable relation. Les animaux, à l’écart de l’anthropomorphise angélique en vigueur, éveillent à la violence du milieu naturel (mortalité, dangers constants, prédation, chaine alimentaire) et opposent au robot une autre programmation, celle de leur instinct. L’humour et l’attachement aux figures se double ainsi d’un parcours plus profond, où la séparation, l’émancipation et la fuite du temps auront leur rôle à jouer.


À ces qualités d’écriture s’ajoute un atout maitre, l’animation elle-même. Les superbes graphismes délaissent le lissage 3D réaliste qui a clairement fait son temps, pour une palette picturale de toute beauté, que ce soit dans l’animation des animaux ou les paysages, avec un gout prononcé pour les plans iconiques, du fracas des vagues aux ciels tourmentés, des forêts enneigées aux prairies automnales. Le film cède certes à quelques inévitables séquences d’action (celle dans la serre notamment, un peu dispensable) destinées à relancer la dynamique et satisfaire toutes les franges du public. Mais c’est bien dans ce temps long du fil des saisons, la croissance d’un être fragile et l’apprentissage de celui qui devra le soutenir que s’épanouit sa poésie, un bien devenu rare et précieux dans l’industrie du divertissement.

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le 3 nov. 2024

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Sergent_Pepper

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