Le Sabre infernal
7.4
Le Sabre infernal

Film de Chu Yuan (1976)

2 forces au monde se confrontent, le sabre et l'esprit: Lequel sortira vainqueur !?


-On avait dit la 3ème veille du 9ème jour du 9ème mois, es tu es venu. Moi, Yan Nan-Fei, n'ai qu'une parole.
-Il y a un an, moi, Fu Hong-Hsue, je t'ai vaincue. Aujourd'hui, tu viens pour mourir.
-Hé hé! C'est pourquoi je buvais, entouré de femmes. Je redoutais de vivre ma dernière nuit. Es-tu prêt?
-Pour tuer, nul besoin de se préparer. Seulement, j'ai oublié pour quelle raison je dois te tuer.
-Tu fais erreur. C'est moi qui veux te tuer. Il y a un an, je doutais que tu étais le meilleur sabre du monde. Mais tu as vaincu mon épée.



Le Sabre infernal est un trésor d’imagination et d'inventivité autour du conte de sabre héroic-fantasy. Le cinéaste Chu Yuan à qui l'on doit une belle palette d'oeuvre comme Le Complot des clans, La Guerre des clans... revient avec Le Sabre infernal dans une aventure wu-xia mettant en avant le comédien Ti Lung avec lequel il a tourné bon nombre de film dans un spectacle ou la surabondance de joute à l'épée alliée à la violence assez extrême ne laisse aucun moment de répit au spectateur. Une oeuvre qui se justifie par l'essence même de sa création les combats!


Le scénario dans sa simplicité de compréhension (fait rare chez ce réalisateur) s'avère muni d'une belle construction et s'établit comme l'un des meilleurs de la Shaw Brother jouant des codes tout du long par des bonnes idées d'imprégnation. Le sabre infernal se dresse comme un véritable hommage aux jeux vidéo et autres mangas avec un héros chevaleresque suivant une quête finissant inéluctablement par se retrouver en fin de chaque événement face à un boss bien spécifique à affronter, comme pour marquer des changements de niveau jusqu'à se retrouver bien entendu face à l'antagoniste principal.


Une autre originalité vient des motivations du héros qui enfin n'est pas motivé par un désir de vengeance comme la très grande majorité des oeuvres d'art martiales de la Shaw. On évolue dans une quête empreinte de péripéties, de contrecoup d’intrigues, et d'action où Ti Lung doit utiliser son intellect et sa raison autant que son talent d’épéiste pour rester en vie.
Le récit évolue dans un monde ou être le meilleur guerrier martial représente le triomphe absolu. LA victoire était synonyme de prestige total où la réputation ainsi que la renommée est plus importante que tout.


En cela l'histoire prend une direction surprenante et intrigante sur sa fin car plus poussée vers la réflexion et le dialectique. Ti Lung finit par apprendre que celui régnant sur le monde des arts martiaux en tant que numéro un Maître YU n'existe plus et que c'est à lui que revient le titre YU. Ainsi on finit par comprendre que tout ce qui arrive au héros n'est qu'un prétexte pour trouver le nouvel héritier du titre prestigieux du plus grand maître; et que celui qu'on pensait être le grand vilain n'est en définitive rien de plus qu'un mirage à hauteur de légende cherchant à tout prix un héritier qui aurait gagné son mérite dans l'honneur des combats et non dans le vice.


Cet ainsi que Ti Lung se retrouve face à un choix cornélien, devenir le nouveau YU, le numéro 1 en acceptant les honneurs, la richesse, les femmes, l'argent, les titres... mais devra à jamais perdurer son statut jusqu'à être un jour destitué par plus fort que lui ou trop vieux pour assurer sa fonction et devra alors lui-même trouver son successeur.
C’est une vision très intéressante pour un tel film qui pousse à la réflexion. Par ailleurs il est très subtil de voir que c'est à la rencontre de divers personnages féminins que procédera en lui un changement dans sa perception du guerrier avec qu'une indigence à la violence que pourtant il embrasse à la base à bras ouverts. Tout ceci mène à un message relativement métaphysique qui sera malheureusement nuancé par le débarquement du grand maître refusant le refus de Ti Lung de poursuivre son oeuvre ce qui colle avec l'héritage des Yu qui ce fait dans le sang.


Techniquement le film à de l'allure avec un esthétisme remarquable, la mise en scène met un point d'honneur quant à la manière dont les antagonistes principaux apparaissent et apportent beaucoup de fluidité sur les différents affrontements, la toute servie par une succession de titres musicaux au top. Ce n'est pas la meilleure production de la Shaw Brothers, mais il faut reconnaître que les décors ainsi que les costumes ont de la gueule, de plus le découpage est superbe.
Il est étonnant de voir à quel point cette oeuvre fantaisie peut être mature par certain choix artistique, par quelques scènes de nudité dont une séquence lesbienne est une trame par moments heurtant la sensibilité par des scènes fortes et violente avec du cannibalisme jusqu'à la tragique prostitution d'une femme n'ayant d'autres choix pour se nourrir.


Les scènes d'action sont dans l'ensemble très bon et surtout inventive grâce à une multitude d'armes plus incroyable les unes des autres entre des plumes-de-paon dorées explosives, des sabres magiques capable de trancher dans le vide, un échiquier géant, un sceptre allongeant... Mais ne vous y trompez pas c'est bel et bien un film d'épée pourvu de superbe chorégraphie assez nerveuse avec quelques performances bien entendu surnaturelles mais dans la crédibilité du récit. Les duels sont pour mon plus grand plaisir relativement long et puis enfin oui enfin on a droit à un véritable duel final 1 vs 1 et non un combat groupé comme la plupart des films de ce genre estampillé S.B. A noté que le film se permet même d'être assez sanglant et violent dans ses propos.


Tous les personnages sont marquants, tout droit sortis d'un livre ou un jeu vidéo. Ils sont tous superbement illustrés par des personnalités propres et fortes ainsi qu'un aspect physique marquant ce différenciant de tous et une technique de combat vraiment à part. On fait face à de grands maîtres martiaux. Entre l'excellent Lo Lieh pour Yan Nan-Fei le second meilleur épéiste, puis les cinq champions de maître YU, mon couchou Norman CHU pour Gu Wu-Ji dit "Echecs", la belle "Poème Tang" manipulant le tissu de combat, le grassouillet et jovial "Peinture WU" utilisant un fouet nunchaku, le sabreur "Epée Hsiao Quatre-sans" manipulant l'épée céleste tueuse de fantômes et la magnifique "Luth Yu" (Lily Li)se servant d'une dague à corde musicale. Une belle panoplie d'adversaire, heureusement il pourra compter sur l'aide de la jolie, ravissante et fragile "Yu-Cheng" joué par la superbe comédienne Ching Li, autant dire que le plaisir est au rendez-vous.
Mention spéciale a la vieille grand-mère cannibale tout droit sortie d'un vieux compte horrifique à l'allure proche d'une sorcière.


Et puis vient le héros Fu-Hung-Hsue joué par un Ti Lung au top de sa condition physique qui incarne un personnage dans la droite lignée des héros du genre, le sauveur de la veuve et de l'orphelin, un grand courage et un héroïsme à toute épreuve qui est tout de même intéressant de voir mis à mal dans sa conception du monde à travers divers tourments, comme les combats sans fin de tous ceux voulant le détrôner ce qui en fait un être également faillible pouvant être gravement atteint et blessé. Pourvu d'une épée matraque tonfa impressionnant avec laquelle il sera à l'origine de bon nombre de duels épiques.


CONCLUSION:


Le Sabre infernal est un grand classique des studios Shaw Bros réalisé par Chu Yuan personnage indispensable à l'évolution des films d'épées chinois. Le film se révèle très divertissant, parsemé d'un scénario simple mais plus judicieux qu'il y parait mettant en scène de superbe confrontation de joute à l'épée. Les comédiens se donnent à coeur joie dans cet univers fantaisie ou la morale et le questionnement ne sont jamais loin. Un excellent cru!
A réserver aux amateurs de duel aux sabres!!!

B_Jérémy
9
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le 1 janv. 2019

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