Tout est bizarre dans ce western de Georges Marshal réalisé en 1948.
D'abord l'histoire d'un comté ou d'une grosse propriété dans l'Etat du Mississipi qui aurait voulu profiter de cette période de sécession des états du sud vers 1860 pour devenir carrément indépendant. Ni pour ni contre. Ça m'avait intrigué car j'ai toujours eu l'impression que le débat sur ce sujet était plutôt binaire avec un choix simple Union ou Confédération. J'ai recherché sur internet et n'ai rien trouvé.
Et puis c'est un film qui rappelle "Autant en emporte le vent" mais dont l'histoire aurait été sciemment "nettoyée" pour en éliminer les aspects scabreux liés à l'esclavagisme. Le propriétaire du domaine qui est aussi le gouverneur de l'état se fait aider par un ami qui est un indien. Hormis les serviteurs de la maison, on voit peu de noirs en définitive et la notion d'esclave est bien édulcorée…
Et puis c'est un western sans en avoir les caractéristiques : peu de bagarres sauf bien entendu la bataille où l'armée sudiste reprend le contrôle de la propriété indépendantiste. Quand les discussions s'enveniment entre deux hommes, on envoie les témoins pour le duel à venir… Pas vraiment le genre du western où on dégaine d'abord et on réfléchit ensuite.
Sans oublier le titre "tap roots" dont je ne comprends pas bien la signification : les racines du robinet (peu probable), racine pivotante (bôf), tapoter, pianoter les racines (bôf aussi) ; la transcription française en "sang de la terre" me parait (pour une fois) bien plus heureuse
Reste l'interprétation et la mise en scène : ah, là, tout va bien.
D'abord Van Heflin, grand acteur dont j'apprécie le jeu par son calme y compris dans les situations critiques ou désespérées. Il la joue souvent au départ en loser ou en grand timide ou en victime puis ses qualités s'affirment au fur et à mesure de l'avancement du film et à la fin, il gagne... Ici, il démarre comme un journaliste du genre frivole et dragueur puis se révèle peu à peu dans le "complot indépendantiste" avant de tomber amoureux de la fille du gouverneur et d'être une pièce essentielle dans le conflit.
La fille du gouverneur jouée subtilement par Susan Hayward, grande actrice qu'on ne présente plus. Emouvante lors de son accident de cheval.
Le meilleur pour la fin : Boris Karloff qui joue le rôle de l'indien sympathique, ami intime et éminence grise de la famille… On est loin des rôles de Frankenstein … Et il est très crédible ce qui démontre la grande qualité de l'artiste.
Bon, au final, si on ne creuse pas trop la vraisemblance du scénario, ce western, puisqu'il est classé dans les westerns, est bien agréable et se regarde avec plaisir dans un technicolor de bonne qualité.