Alors oui, *Le Scaphandre et le Papillon* – vous finissez par avoir l’habitude – c’est un film très lent. Et je ne l’ai pas vu d’une traite.
Regarder Le Scaphandre et le Papillon vous fait prendre conscience de ce que l’on manque dans la vie, ce dont on ne profite pas assez. Vous serez probablement pris d’un doute existentiel ou parfaitement extérieur au film.
Le film scaphandrier
Personnellement, je confonds toujours le scaphandre et la combinaison spatiale. Étonnant puisqu’ils sont parfaitement opposés, l’un vous entraîne au centre de la Terre, là où la pression peut vous anéantir. L’autre vous permet de vous échapper, loin, très loin de la Terre, là où votre masse n’a plus aucune importance au milieu de cette myriade d’astres.
Tout mon visionnage durant, cette analogie me trottait dans la tête. Représenter le point de vue de Jean-Do qui n’a plus qu’un œil de la même manière que s’il était coincé dans un scaphandre, comme dans l’eau, la vision aussi troublée que l’esprit mais avec le monocle qu’offre la combinaison spatiale.
Oui, je sais, vous pensez que je me suis encore perdue en analyse mais que nenni ! Je vous parle ici de sentiment. Je n’ai pas cherché à analyser ce film mais à le vivre, puisque le personnage était en train de mourir. Et, justement, l’impression d’être vouée à couler avec Jean-Do, coincé dans ce scaphandre au beau milieu des abysses, c’est ça que la simple mais brillante mise de scène de Julian Schnabel traduit si bien.
C’est fou la pitié qu’on accorde à un mourant
Schnabel fait le choix de mettre en évidence le personnage volage qu’est Jean-Dominique Bauby, un personnage que nous, spectateurs, aurions d’ordinaire purement détesté. Et pourtant voilà que l’on sourit quand il marmonne pour lui-même aux jeunes infirmières de se pencher d’autant plus vers lui. On sourit quand, dans ses souvenirs, il part en road-trip avec sa maîtresse à Lourdes. Et on pleure quand son ex-femme et sa maîtresse entrent en communication alors que cette dernière faire une ultime déclaration d’amour à Jean-Do.
Les souvenirs, aussi tristes soient-ils sont traités avec douceur par des voix maîtrisées en hauteur, des images chaudes et nous, simples spectateurs assis sur notre siège, notre canapé, on se prend à s’identifier au personnage au fur et à mesure que Jean-Do nous montre les dossiers bien rangés de sa mémoire.
Ô imagination, que ferions-nous sans toi ?
Bien que cela ne représente que 3 % du film, le rapport à l’imagination m’a particulièrement bouleversée. On parle du pouvoir de l’imagination dans les films d’animation et tout particulièrement à destination du jeune public, les enfants qui ont encore besoin d’avoir d’éveillé leur imagination. Seulement, en grandissant on nous demande d’utiliser notre imagination de manière profondément réductrice car dédiée au travail.
Ici, le personnage de Jean-Dominique tient un discours qui, je crois, est à prendre au sérieux (mais gardez tout de même un brin de légèreté, je sais que le film est dur mais la vie est belle!), l’imagination est primordiale lorsqu’il s’agit de survivre.
Toutes ces séquences dans l’hôpital, disséminant des anachronismes, des personnages de rêves mais aussi celles durant lesquelles il imagine partager un fastueux repas avec son assistante personnelle. Toutes ces séquences permettent au personnage de s’échapper, de prendre son envol, comme un papillon afin de s’arracher de sa condition. Il n’est plus cette larve coincée dans un œil, il est bien plus, il traverse le temps (et Noir Désir dirait qu’il est omniprésent).
Bref, ce film relève d’une réelle réussite, un bouleversement pour le spectateur qui le verra. Sans tomber dans le pathos d’un pauvre invalide qui trouve en son assistante la lumière, Julian Schnabel, adapte parfaitement le livre homonyme et rappelle au monde combien rêver et profiter est une nécessité. Il nous rappelle que l’invalidité du corps n’est pas une barrière à l’esprit.
Vous admirerez la brièveté de cette critique, pour une fois.