Alors que nous pouvons être fier de notre Pascal Laugier national, qui a su mettre sur pied un véritable film d’horreur d’envergure avec Ghostland, il faut également compter sur le cinéma espagnol pour nous offrir une nouvelle année horrifique de bonne tenue. Après Alejandro Amenábar (Les Autres), Jaume Collet-Serra (Esther), Juan Antonio Bayona (L’Orphelinat) ou encore le duo Paco Plaza/Jaume Balagueró ([REC]), il faudra également compter sur Sergio G. Sánchez. Et pour cause, après avoir été scénariste pour – tiens, tiens ! – Bayona (L’Orphelinat, The Impossible), voici que le bonhomme se lance dans la réalisation avec Le Secret des Marrowbone. Un petit titre horrifique (bien plus épouvante, avouons-le) sans prétention qui mérite le coup d’œil et qui fait honneur au genre, bien qu’il y ait encore du chemin pour Sánchez en matière de réalisation.
Et pour cause, si l’on devait reconnaître un défaut à ce film, c’est avant toute chose son aspect hautement commun, impersonnel. Au-delà de savoir mener les tâches du réalisateur à bien (mettre une histoire et un message en images, retranscrire visuellement des émotions, diriger et gérer une équipe de tournage…) et d’avoir le savoir-faire, il faut également savoir se démarquer. Avoir une patte, une signature, qu’elle soit thématique (certains cinéastes exploitent plusieurs films pour traiter un sujet qui leur est cher) ou bien visuel (le style de la mise en scène), qui permet d’imposer son œuvre parmi tant d’autres. Et malheureusement, sur ce point, Sánchez n’est pas encore à la hauteur. Non pas qu’il soit mauvais réalisateur, car étant parvenu à diriger ses acteurs comme il se doit. À avoir livrer un film maîtrisé dans tous ses aspects. Juste qu’il n’a pas encore le talent pour faire un long-métrage qui lui soit propre. À bien regarder Le Secret des Marrowbone, le titre ressemble à n’importe quel thriller d’épouvante déjà existant, avec les mêmes ressorts horrifiques (ambiance angoissante, quelques jump scares…). Le strict minimum, en gros !
Mais un minimum effectué avec beaucoup de savoir-faire. Certes, Sergio G. Sánchez a encore du chemin pour s’imposer dans le métier de réalisateur, mais il a le mérite de savoir mener une telle barque. Ce n’est pas donner à tout le monde de réussir à rendre un film intéressant, intriguant et captivant. Surtout dans le domaine de l’horreur, de l’épouvante ! Et avec Le Secret des Marrowbone, Sánchez est parvenu à livrer un titre diablement efficace. Un divertissement qui sait titiller nos nerfs via une ambiance pesante et un sens du montage pour le moins pointilleux. Qui arrive à nous fait croire en ses personnages (un fait plutôt rare dans ce genre, ne le cachons pas !) et à leur histoire. Qui propose un rythme pour le moins soutenu, nous procurant une dernière partie plus que tendue et même puissante question émotions. Bien que certains clichés ne sont pas évités (par exemple la séquence de la page, avec soleil et belle musique en fond), Sánchez donne à son film un certain cachet qui le transforme de film banal à efficacité pure. Nous en avons pour notre argent, nous sommes happés par l’ensemble de bout en bout. Que demander de plus, franchement ?
D’autant plus que si Sergio G. Sánchez fait le (bon) minimum en guise de réalisation, il se sert de son expérience en tant que scénariste pour faire du Secret des Marrowbone l’une des nouvelles pépites en matière de suspense. Une intrigue à la hauteur de Sixième Sens et Les Autres, c’est pour dire ! Un récit qui s’intéresse pleinement à chacun de ses protagonistes, à mettre leur histoire en avant pour nous la faire vivre. Et à nous surprendre par le biais d’un twist final totalement inattendu alors que le long-métrage fourmille d’indices. Le genre de dénouement qui donne au film une toute autre ampleur, un impact percutant. Il est difficile à un réalisateur-scénariste de savoir jouer autant avec le spectateurs, de le mener ainsi par le bout du nez. Et cela, Sánchez y est parvenu sans aucun soucis ! Conférant ainsi à son film un intérêt non négligeable.
Donc, si vous n’avez pas encore vu Le Secret des Marrowbone, il serait temps de vous rattraper ! Car vous passez à côté d’un titre sur le papier déjà-vu (notamment à cause de son côté lambda et sans prise de tête) mais qui saura vous impressionner par la très grande maîtrise de son récit. Ce dernier se présentant riche en rebondissements et tenant la route comme il se doit. Il ne manque donc plus qu’un peu plus d’expérience à Sanchez dans la carrière de réalisateur afin qu’il parvienne à sortir un film potentiellement culte. Et pour une nouvelle réalisation, être à la limite de ce constat, c’est déjà quelque chose de fort ! Un cinéaste à suivre, en espérant qu’il ne se repose pas sur ses lauriers.
Critique sur le site https://lecinedeseb.blogspot.com/2019/02/rattrapage-2018-le-secret-des-marrowbone.html