Filmé presque entièrement à Paris, c'est l'histoire éprouvante, presque traumatisante d'une déchéance inexorable et terriblement rapide, celle de Pierre Wesserlin (Jess Hahn), un artiste (compositeur de musique) américain imprévoyant et prodigue qui, à la mort de sa richissime tante, se croit un moment milliardaire... avant de déchanter. Bientôt sans domicile, puis sans ressources, de plus en plus sale et affamé, son errance dans les rues de Paris est terrifiante, pathétique, tandis qu'un violon accompagnateur de sa dégringolade sociale grince pendant tout le film et nous scie les nerfs.
Typiquement nouvelle vague, presque complètement tourné en extérieurs, aux quatre coins de Paris, plus ou moins "à la sauvette" et caméra à l'épaule. Avec plein de visages célèbres peuplant le Saint Germain-des-prés de ces années-là (dont : Michèle Girardon, Stéphane Audran, Macha Méril, Marie Dubois, Françoise Prévost) et presque oubliés aujourd'hui. On remarque aussi un caméo de JLG, lors de la "bringue" (en début de film) que le potentiel milliardaire organise en empruntant sur son supposé héritage.
Datant de 1959, le film (le tout premier long de Rohmer et qui n'annonce pas vraiment sa façon de faire future, son style caractéristique) a un peu vieilli, ne serait-ce forcément qu'au niveau des voitures qui sillonnent les rues de la capitale et de la façon dont sont vêtus les gens (surtout les jupes des filles), mais pas tant que ça. En tout cas, on est pris par cette terrible odyssée, on y croit. Et le réalisateur ne fait intervenir un deus ex machina qu'en tout tout dernier ressort, histoire de nous faire bien comprendre que ce lion-là, aussi sympathique qu'il nous soit, a frôlé l'abîme.