La poésie, c'est avant tout une recherche de la forme. Ainsi les mots sont choisis non seulement pour leur sens, mais également pour leur sonorité, et pour les affects qu'ils déclenchent. En ce sens, on peut dire que ce film est un film poème, avec ce que cela comporte d'hermétisme. Cela ne signifie pas pour autant manque de narration, après tout à l'aube de la littérature la poésie servait à raconter.
On se laissera porter par les images, et on profitera des belles choses qui nous sont offertes : un enfant décrivant pour sa mère aveugle une éclipse qu'il ne voit pas à cause des immeubles ; Des toits d'immeubles utilisés comme espace libertaire ; des coups de feu, son d'une parfaite banalité pour les passants, qui ne sont en fait que le claquement d'une porte mal huilée. Et bien d'autres choses encore. Mais bien sûr, il faut accepter de se laisser porter : ressentir, plus que réfléchir. On en regretterait presque que la critique du régime se fasse parfois si explicite! C'est que le film est si solaire, au sens propre comme au sens figuré.
Ainsi ce film n'a aucune chance de séduire les détracteurs de la nouvelle vague, qui n'y verront qu'une afféterie de plus. Laissons-les dire, il y a bien assez de films pour le goût de chacun.