L'inceste, dont certains se sont complaisamment effarouchés comme si Malle en faisait l'apologie, entre un adolescent et sa mère n'a, en jugeant du tact de Louis Malle, rien d'indécent ni de hideux, et n'est que la péripétie finale, la conclusion, d'un malaise affectif que le cinéaste signifie tout au long du film.
Sans rentrer dans le détail psychologique, "Le souffle au coeur" reste avant tout le portrait d'un adolescent ordinaire et sensible qui s'éveille au sentiment et à la sensualité. Avec pudeur, mais sans tabou, Louis Malle affine le portrait de Laurent, évoque l'affectivité et le caractère de l'adolescence sans tomber dans les clichés ou les généralités.
La justesse du milieu familial et social dans lequel vit le jeune Laurent contribue à la vérité du personnage (quelle est sa part autobiographique?) et, irréductible du sujet, cette peinture de la bourgeoisie du début des années 50 détermine son originalité. Entre un père distant et une mère oisive, l'adolescent bénéficie avec ses frères, dont il se distingue par l'intelligence, d'une grande liberté et semble peu contraint par l'éducation bourgeoise et religieuse qu'il reçoit. De sorte que le film n'est ni austère ni affecté mais humain et vivant tout simplement.