Dans l'âge d'or du cinéma mexicain (1940-1960), aux noms plus ou moins familiers d'Emilio Fernández, d'Ismael Rodríguez, de Roberto Gavaldón, voire de Julio Bracho, il conviendrait sans doute d'ajouter celui de Rogelio A. González, à condition d'accéder à ses films. La découverte de Le squelette de madame Morales est en tous cas une belle source de jubilation. Cette comédie noire, aux confins du fantastique, s'en prend avec délectation à la petite bourgeoise bigote et à une Église toute-puissante, qui se veut directrice de conscience de tout un pays. La forme n'est pas en reste dans cette fable aux accents surréalistes, la mise en scène de Rodríguez osant quelques cadrages joliment biscornus. La vie conjugale en prend pour son grade et c'est à se demander qui veut la peau du taxidermiste, homme plutôt bienveillant et épicurien dont la vie de couple est devenue un enfer à cause d'une épouse confite en dévotion et habile à se poser en victime auprès de son entourage. La suavité du grand acteur Arturo de Córdova n'est pas pour rien dans le plaisir pris devant cette pépite qui se dévoile enfin au public européen.