Le Tigre du Bengale – Version Eichberg 1938

Après la féérie des films de Fritz Lang, voyons un peu ce que Richard Eichberg avait concocté en 1938 à partir du même roman.…

Déjà, l'intrigue s'annonce très différente sur un scénario beaucoup plus complexe.

Ici, il y a déjà beaucoup plus de personnages. D'abord un aventurier Sacha Demidoff poursuit la danseuse Seetha de ses assiduités dont on comprend qu'ils se sont aimés jadis à Paris. Seetha, qui est ici l'épouse du Maharadjah Chandra, monarque éclairé, va s'enfuir avec Demidoff. Chandra est secondé par son frère le prince Ramigani, faux comme un jeton comme chez Lang. Entrent en scène deux architectes européens dont les fiancées, en particulier Irène, poussent à convaincre le Maharadja de lancer le projet de construction qui s'annonce mirifique.

Côté amours, dans cette première partie, Seetha est l'objet de convoitise de Chandra, Sacha, l'aventurier, mais aussi de Ramigani ; mais on devine que la fiancée (allemande) de l'architecte, Irène, se laisserait bien faire un petit cinq à sept avec le Maharadjah (sûrement pour la bonne cause). Il n'y a que l'architecte qui n'est qu'un architecte dont on ne comprend pas toujours l'attachement à sa fiancée ...

Bon, ceci étant dit, il y a une différence fondamentale entre les deux "Tigre du Bengale". Autant, celui de Lang nous immerge complètement dans une Inde féérique voire terrible puisqu'à la fin, Seetha et l'architecte, fuient à travers un désert torride et impitoyable, autant le film d'Eichberg commence en Inde pour se poursuivre en Europe où le Maharadjah Chandra et son acolyte Ramigani sont à la recherche des fuyards Seetha et Demidoff.

Et ça c'est terrible pour le film d'Eichberg, comparativement à la version Lang, car ça casse complètement le rêve, la richesse et le faste incommensurables de ces principautés, le paradis tropical, l'aventure, quoi. On est dans le réalisme avec les petits calculs, les petites manigances, les petites manœuvres. En fuite, Demidoff fait travailler Seetha dans un spectacle de danse dans un cabaret (faut quand même bien vivre). La fiancée de l'architecte, Irène, fait des pieds et des mains (en tout bien, tout honneur, on est en 1938 et dans une Allemagne nazie) pour convaincre le Maharadjah d'accepter son mari pour son projet de nouvelle ville et convaincre son mari d'aller en Inde. On est dans le film d'aventures lambda où on semble entrer et sortir de la principauté assez facilement, où la principauté est finalement un état comme un autre. Alors que chez Lang, on peut y rentrer dans la principauté, par contre en partir contre la volonté du Maharadjah, c'est nettement plus galère.

Côté actrice, évidemment (je suis un peu subjectif, c'est vrai) Debra Paget en jette un peu plus que l'allemande La Jana (je ne connais pas) même si cette dernière ne démérite pas du tout. D'ailleurs, à l'origine, Debra Paget et La Jana sont des danseuses professionnelles.

Un point important qui donne une force supplémentaire à Debra Paget, c'est que les danses que fait cette dernière sont des danses sacrées en petit comité et non un spectacle "grand public" comme dans le film d'Eichberg. Chez Lang, les danses prennent un tout autre relief et surtout "classent" Debra Paget comme un personnage d'importance puisqu'elle détient le droit d'effectuer ces danses sacrées.

De l'exotisme chez Eichberg, il y en a bien avec la chasse au tigre, les éléphants, les scènes animalières avec les singes, le dromadaire, etc . Mais reconnaissons que Fritz Lang, ayant sûrement vu le film d'Eichberg, a revu les choses en plus grand, en plus flamboyant. Il y avait notamment la couleur dont ne disposait pas Eichberg.

En final, le film se regarde sans problème mais est largement surclassé par son remake.

JeanG55
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le 19 mars 2023

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