Cyrano de la République

Le Tigre et le Président offre une scène permettant à Jacques Gamblin et André Dussolier d'exprimer tout leur talent. C'est d'ailleurs le problème du premier long-métrage de Jean-Marc Peyrefitte se repose trop sur la qualité de l’interprétation des deux acteurs. Et ce malgré une réalisation et mise en scène soignées, ainsi que des dialogues très bien écrits.

Sans savoir comment précisément la raconter, hésitant entre drame et comédie, le film narre l’histoire improbable et romanesque d'un président extraordinaire qui n'aura pour seul héritage une ubuesque chute de train. Ce Président confrontera le Tigre, Georges Clémenceau aussi remarquablement interprété par Dussolier, dont les joutes et la rivalité bien qu’accessoires au film seront jouissives.

- Monsieur Clémenceau, vous avez gagné la guerre, laissez-nous gagner la paix. - Monsieur Deschanel, je suis comme la guerre. - C'est vrai. Vous êtes fini.

Après un début flamboyant, Le Tigre et le Président souffre cependant d'une terrible baisse de rythme à la fin du premier tiers qui ne s'arrangera malheureusement pas. De jolies scènes viendront sauver le spectateur d'un ennui auquel il serait facile de s'abandonner. Notamment celles du Président avec le couple de cheminot et leur belle-fille veuve dont Deschanel feint finalement de ne pas être véritablement le Président de la République jusqu'à la poignante démission dans les jardins de l'Elysée de sa fonction.

C'est pas tous les jours facile de changer la France.

Outre la pittoresque mais véritable péripétie du train, Le Tigre et le Président narre les quelques mois d'un président idéaliste et progressiste pour qui la morale prévalait.

Aux airs de Cyrano, par sa maître de la langue française et de la formule, dont les seules armes sont les mots, Deschanel est ici un personnage romanesque dont la chute sera aussi forte que son ascension.

Je ne veux pas parler à tout le monde. Je veux parler à chacun.