A travers un fait de guerre anecdotique, Litvak dévoile un pan de la seconde guerre mondiale. Non pas que le jeune traître allemand -qualification qui ne traduit pas la conviction pacifiste idéalisée du personnage d'Oscar Werner- soit une figure d'une dimension ou d'une envergure supérieures. Et, d'ailleurs, les motivations du traître à sa patrie semblent, d'un point de vue humain ou psychologique, trop sommaires.
En réalité, la vraie originalité du sujet tient au lieu-même de l'action. L'Allemagne de la fin de la guerre, reculant sur elle-même, est un pays en phase d'anéantissement, et le réalisateur Anatol Litvak montre bien l'errance des civils et des militaires dans des villes en ruine où le désordre le dispute à l'ahurissement. A tel point que lé périple de Karl, par ailleurs excellemment interprété, dans ces paysages de désolation, nous rappelle celui de Louis-Ferdinand Céline dans "Rigodon".
On pardonnera mieux alors au réalisateur un prologue un peu long (le choix du traître par les forces américaines) tout en en regrettant l'erreur grossière qui consiste à faire parler les nombreux personnages allemands en langue anglaise, au détriment de l'authenticité la plus élémentaire.