En revoyant près de 30 ans après ce western, je mesure ô combien Budd Boetticher a apporté au genre qui me passionne depuis toujours, car avec le budget souvent très modeste qu'on lui allouait (ici Universal), il vous plantait un décor et brossait le portrait des personnages principaux en 10 minutes, et ceci sans paraitre gauche ou mal foutu.
C'est le cas avec le Traitre du Texas, petite série B comme Hollywood en produisait à la tonne à cette époque, auquel Boetticher donne une dimension morale indiscutable, avec des relations entre bons et méchants qui sont sans sous-entendus. Sinon, c'est une histoire classique de rivalité entre 2 frères, thème récurrent du western auquel Boetticher ajoute d'autres thèmes : la volonté de puissance de Dan Hammond (Robert Ryan), l'anti-héros au demeurant sympathique et revanchard mais extrêmement cynique et implacable, le paternel débonnaire et un peu dépassé par les événements, la belle aventurière ambitieuse et ne pensant qu'à l'argent, le riche propriétaire brutal et odieux, le drame des Sudistes spoliés, pleins de rancoeur et livrés à eux-mêmes, la zone franche sur laquelle règne un général mexicain... on voit que les personnages échappent aux conventions du western de série des années 50, d'où peut-être le fait que c'est le western le moins connu de Boetticher.
Employant un excellent casting de seconds rôles solides autour de Robert Ryan à la composition remarquable en cowboy violent et romanesque, comme Raymond Burr, John McIntire, le tout jeune Dennis Weaver, Rodolfo Acosta, la belle Julia Adams (brune piquante qui sera un peu plus tard la proie de L'Etrange créature du lac noir), et Rock Hudson qui n'était pas encore tout à fait vedette (son rôle est plutôt en retrait), Boetticher signe un de ses meilleurs films en laissant paraître son style déjà nerveux et passionné. A (re)découvrir.