Le traître du Texas (et pour une fois, le titre français est plus inspiré que le titre original, Horizons West) est le cinquième western du prolifique réalisateur Budd Boetticher. Sorti en 1952, c’est-à-dire la même année que trois autres films de Boetticher : A feu et à sang, western découvert l’autre jour sur les 400 coups de la Bande des Dalton, ainsi que deux autres films aujourd’hui introuvables, Les rois du Rodéo et Les conducteurs du diable. Je vous le disais, ce cher Budd est un réalisateur prolifique !
Produit sous l’égide d’Universal avec un budget minimum, le film est réalisé en 4/3, format d’image assez peu utilisé dans le western, un genre qui demande bien souvent une certaine horizontalité de l’image afin de filmer les grands espaces. L’une des particularités du Traître du Texas est en effet qu’une majeure partie de l’intrigue se passe en intérieur.
Il s’agit de l’histoire assez classique de deux frères qui rentrent au ranch familial, près de la ville d’Austin, après quatre ans d’une guerre de Sécession côté sudiste, dont ils sortent perdants. A leur retour, bien des choses ont changé et la reprise d'une vie d’éleveurs est difficile.
Neil, le plus jeune fils, s’y accommode. Mais Dan, l’aîné, n’a qu’une envie : devenir riche, rapidement, en construisant un vaste empire terrien.
J’ai toujours apprécié Budd Boetticher pour la rapidité de sa réalisation. Rares sont ses films à dépasser les 1h20. Le Déserteur de fort Alamo, et bien sûr mon préféré Sept hommes à abattre, sont de parfaits exemples de la maîtrise du réalisateur en matière de concision et d’efficacité.
Or, avec Le traître du Texas, je trouve que cette efficacité ne fonctionne pas. Nous n’avons pas le temps de véritablement nous attacher aux protagonistes, et les péripéties s’enchaînent de manière trop rapide pour nous en laisser apprécier toutes les subtilités.
Sans un sou, Dan Hammond se fait prêter bien facilement la coquette somme de 1000$, et la dépense tout aussi vite dans une séquence de poker complètement expédiée. Dès la première main, le voilà endetté de 5000$ auprès d’un riche propriétaire terrien !
J’ai également eu beaucoup de mal à croire à son intégration dans la bande de brigands, dont le campement est voisin du ranch familial : une petite bagarre dans la poussière avec deux hommes et pouff, le voilà nommé chef du gang !
Désormais, Dan vit une double vie, fils de bonne famille d’apparence, mais leader d’un groupe de brigands qui vole de troupeaux pour les revendre hors du Texas, dans la Zona Libre.
Le dernier acte narratif est carrément expédié. En l’espace de 20 minutes, le film nous présente l’ascension fulgurante de Dan comme nouveau riche grâce à des magouilles juridiques qui lui permettent d’annexer et de devenir propriétaire de nombreux ranchs de la région, puis sa brouille avec son frère qui lui reproche d’avoir quitté la voie de l’honnêteté, et finalement la révolte contre lui, et l’inévitable chute d’un homme trop avide.
On croirait presque à un montage du résumé de la saison 2 de la série !
Malgré ces grands défauts, liés sans doute à un budget trop court, la réalisation est de qualité (quelques mouvements de caméra maladroits) et les acteurs sont corrects. Robert Ryan (qui interprète Dan) incarne parfaitement l’homme cupide et cynique. Il a presque tendance à effacer la prestation des autres acteurs, notamment celle de Rock Hudson qui joue son frère Neil.
Pour finir, j’ai trouvé la belle Julia Adams (principalement connue pour le film de Jack Arnold L’étrange créature du lac noir) très juste. Sa prestation dût faire sensation car on retrouve l'actrice l’année suivante dans deux autres westerns de Budd Boetticher : Le déserteur de fort Alamo et Révolte au Mexique.
Bien que chargé en rebondissements, Le Traître du Texas laisse un petit goût amer, en raison notamment de son montage expéditif. Pour moi, un film mineur, qui ne reste pas comme le morceau de choix de la filmographie de Budd Boetticher.