Oscar en 1948 du meilleur réalisateur, de la meilleure adaptation et du meilleur second rôle (pour Walter Huston, qui n'est autre que le père de... John Huston), "Le trésor de la Sierra Madre" permet à John Huston de retrouver le comédien Humphrey Bogart, situant son film dans un contexte historique, celui de l'après-révolution mexicaine.
Comme souvent chez le cinéaste, l'aventure ne revêt pas ici les atours du glamour hollywoodien ou de l'exotisme de pacotille, mais transpire au contraire la crasse, la poussière et le sable, le sang et les pires travers humains. Plus proche de ce que sera le western crépusculaire à la Peckinpah que du récit classique d'aventure, "Le trésor de la Sierra Madre" est une oeuvre étonnement sale et pessimiste (on sent que le second conflit mondial est passé par là), qui aura eu le courage de prendre le spectateur de l'époque à contre-pied, à commencer par l'image déformée d'un Bogart grandiose en salopard abjecte, bien loin de son aura classieuse.
En fin observateur et en grand timbré qu'il était, Huston s'amuse à nous montrer jusqu'où peut mener la cupidité, l'envie de posséder, prenant un malin plaisir face à la déchéance de son anti-héros, simple clochard en quête de bons plans qui finira par se brûler les ailes, rendu fou et parano par les perspectives et les rêves que lui faisaient miroiter cet étrange sable doré.
Malgré ses quelques défauts, "Le trésor de la Sierra Madre" garde encore intact son pouvoir de fascination, conte morale aussi abouti formellement que thématiquement, qui reste sacrément couillu pour son époque.