La cellule souche
Le Trou... C'est fou comme je l'ai mis de côté, lui, un peu gêné parce que, devant cette déferlante de compliments particulièrement mérités, je sens bien que je vais surtout devoir expliquer ma...
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le 22 févr. 2012
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En un titre, Becker insuffle toute la poésie nécessaire pour faire de son film autre chose qu'un film d'évasion. Le Trou. C'est évidemment le trou dans lequel on est jeté, impossible à échapper, mais c'est aussi le trou qui nous permettra de voir une autre vie, qui nous permettra de nous échapper de celle que l'on a. Ce titre prend donc un double-sens : il est à la fois notre prison et notre instrument de liberté.
Un peu à l'image de notre existence en somme. Becker insuffle par cette idée une poésie loin de l'univers carcéral que l'on pourra voir d'habitude au cinéma. Les raisons de l'incarcération des 5 prisonniers resteront inconnues, et leurs caractères sympathiques. Ainsi, chacun devient victime de sa condition existentielle, et l'identification du spectateur n'a plus qu'à attendre patiemment pour se révéler.
L'extérieur de la prison devient un but poursuivi, recherché à tout prix, et pourtant totalement inconnu. On penserait presque à une mort fantasmée, nous délivrant de nos vies si pauvres en possibilités. Une mort passant par un tunnel, pour aller vers la lumière.
Cette existence si limitée dans les choix nous poussera à sublimer notre créativité et notre ingéniosité. C'est dans la contrainte que l'on se surpasse, et Becker le sait. D'une absence de musique, d'un rythme lent, d'un scénario minimaliste, émergeront une mise en scène flattant le spectateur en jouant sur l'évocation plus que sur la monstration, et une mise en place des enjeux précise pour un résultat d'un suspense intense. Film sur la captivité, il prend le parti de devenir son contraire : film sur l'envie de liberté, et sur la capacité de l'Homme à survivre.
Malgré cette idée qui traverse le film, le dénouement se fait terrible. Gaspard gagne le choix entre une vie morne et esseulée, et l'inconnu de cet extérieur. La peur de ce dernier nous empêchera de faire un choix réfléchi : encore une fois, survivre est tout ce qui importe. Mais cette fois-ci, ce ne sera que pour éviter la peur de l'abîme.
Pauvre Gaspard...
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le 9 janv. 2017
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