Après une quinzaine d'années de courts-métrages spatiaux qui ne sont qu'ersatz de l’œuvre de Méliès, le premier format long est issu du Danemark, produit en pleine Première Guerre Mondiale. Sa durée d'1h20 est bien équilibrée : 20min de préparation, 15min de voyage spatial, 30min passées sur Mars à la découverte de la culture, 15min de retour mouvementé sur Terre en guise d'épilogue. Le tout accompagné d'un piano parfois répétitif (mais propre à l'époque), et d'intertitres un peu chargés en texte. C'est assez amusant de voir les notions scientifiques incomplètes et fantaisistes de ce début de XXe siècle, notamment avec ces fameux "canaux" martiens à la surface, laissant alors penser à l'existence d'une civilisation établie autour de sources d'eau. Ces interprétations avaient déjà inspiré le Un Matrimonio Interplanetario de Novelli. Ici, point d'aventure à la John Carter, publié quelques années avant, mais plutôt un message pacifique avec la vision utopique d'une civilisation avancée, devenue végétarienne et en harmonie avec la nature, dans une imagerie gréco-romaine. C'est une SF qui veut inspirer, tout en critiquant les vices de la société. Il suffit d'imaginer, en 1918, à quel point la densité visuelle du film a pu nourrir bien des fantasmes. Les décors sont opulents, les figurants se comptent par centaines, et on a même des plans aériens impressionnants. Le long-métrage n'a pas fait mouche parmi les nations avides de chairs et poudre à canon, mais il est un indispensable cinématographique au planet opera.