Le film de Philippe Harel a eu une drôle de promotion. Une affiche ultra classique instaurant peut-être un contexte de comédie et une autre volontairement floue. Dans les deux cas, des affiches qui ne vendent pas bien le film, ce qui s'est confirmé dans les salles (617 105 entrées) et par la postérité de l'oeuvre quasi-nulle. Benoît Poelvoorde a beau avoir gagné en popularité avec Le Boulet (Berbérian, Forestier, 2002) et surtout Podium (Yann Moix, 2004), on cite rarement Le vélo de Ghislain Lambert comme un de ses meilleurs films ou rôles.
Bien dommage au vue de sa performance et du film lui-même. Le vélo de Ghislain Lambert n'est pas une comédie contrairement à ce que suggère sa promotion ou son acteur principal souvent caricaturé comme comique de service. C'est une chronique sportive dramatique où les rires peuvent survenir de certaines situations cocasses. Evidemment, il est amusant de voir Poelvoorde dopé partir comme une fusée, mais on sait déjà que cela va mal se finir (la piqûre c'est bien mignon, mais cela ne dure pas sur toute une course).
C'est là où Harel se révèle pertinent dans son traitement. Certaines situations peuvent être drôles, mais elles se terminent systématiquement mal pour son personnage principal, au point que le spectateur ne rit plus du tout au bout d'un moment. Ghislain court, mais n'est pas un bon coureur. Il ne finira qu'une seule fois premier et encore, sous les critiques de ses concurrents. Quand il ira au Tour de France, les journalistes ennuyés par le triomphe d'Eddy Merckx en feront leur sujet de prédilection. Le cycliste que l'on soutient car c'est un raté. Pour montrer qu'il est nul. Donc même quand Ghislain est sous le feu des projecteurs, ce n'est jamais en sa faveur. Ce qui rend son parcours assez tragique et triste.
Harel se paye les médias racoleurs, le milieu du cyclisme (les magouilles et le dopage ne datent pas de Lance Armstrong), la famille (le frère de Ghislain joué par José Garcia est très loin d'être sympathique), mais ne se moque jamais de son héros. C'est un personnage sympathique qui n'a pas de chance et que Poelvoorde joue avec une certaine sobriété. En dehors du passage dopé et de son coup de folie, Poelvoorde ne part jamais dans ses excès habituels, ce qui rend sa prestation aussi surprenante que bienvenue.
Le vélo de Ghislain Lambert est donc un film très intéressant qui mériterait certainement plus de visibilité.