Miyazaki tire sa révérence en beauté.
Dès le premier plan du film, Miyazaki cite Paul Valéry pour nous expliquer la tonalité de son film ("Le vent se lève.Il faut tenter de vivre). Il est vrai que son personnage principal, connu pour avoir été l'ingénieur du chasseur zéro japonais, a vécu selon le précepte du poète car il a traversé des épisodes douloureux dans son existence ( dont un tremblement de terre et une guerre mondiale. Je vous laisse découvrir les autres). L'accumulation des épreuves de Jiro Horikoshi est cependant manifeste et il a eu le mérite de réaliser son rêve (devenir ingénieur en aéronautique) et de remplir sa vie comme il le souhaitait.
Au niveau du contenu litigieux sur lequel une certaine presse a voulu ergoter, j'estime que le procès fait au film de Miyazaki est outrancier. Le fait que Jiro Horikoshi ait dû collaborer à l'effort de guerre japonais en dessinant des avions à mitrailleuses, que son pays s'est retrouvé allié à l'Allemagne et à l'Italie de 1939 à 1945 ne fait pas de cet homme un salaud de la pire espèce. Par touches oniriques et humoristiques, Miyazaki s'empresse heureusement de défendre un homme dont la prétention était de faire voyager des familles et pas uniquement des soldats. Autrement dit, le réalisateur de Ghibli a bien fait de casser les stéréotypes nauséabonds autour des peuples allemands, italiens et japonais pendant la deuxième guerre mondiale. En choisissant un designer latin généreux qui revient dans les rêves de l'ingénieur et en montrant un homme riche allemand ouvert d'esprit que Jiro rencontre dans un hôtel, Miyazaki a une démarche efficace et remplie de bon sens.
Au niveau de l'animation de ses personnages et de ses objets, Miyazaki réussit à nouveau à insuffler sa marque de fabrique:une candeur et une sensibilité que même Pixar,Dreamworks et Disney réunis n'arrivent plus à obtenir. Les scènes les plus marquantes sont celles où Jiro fait la cour à sa future femme Naoko en lui fabriquant des avions en papier où encore celles où l'ingénieur italien lui présente les derniers modèles ( à but pacifique) de sa flotte. C'est dommage que des enfants restent encore trop jeunes pour apprécier la subtilité de cette mécanique narrative et picturale qui crève l'écran.
Le seul petit bémol, et ce sera bien le seul que j'émets, c'est les petites longueurs présentes jusqu'au moment où Jiro part en Allemagne pour visiter Junkers, fleuron de l'aéronautique. Personnellement, je trouve que le film "décolle" à ce moment précis et trouve sa vitesse de croisière. En tout cas, Monsieur Miyazaki nous laisse un dernier film maîtrisé, émouvant et trés bienveillant. Une façon de tirer sa révérence qui aurait du recevoir un respect unanime.