Le Vent se lève par DarkDojy
C'est avec un pincement au cœur que je suis allée voir ce film, sachant qu'il s'agirait du dernier Miyazaki (qui a annoncé sa retraite dans la foulée).
J'ai soigneusement évité toute bande annonce, tout résumé, souhaitant y aller sans aprioris, et caressant l'espoir secret d'être émerveillée comme devant la plupart de ses films.
Et bien les enfants, missions accomplie.
Miyazaki nous emporte au cœur du Japon des années 20-30, un Japon encore très rural, un Japon d'entre deux guerres, et maîtrise avec virtuosité toutes les tensions que cela implique.
Le rythme est assez lent - rien de nouveau sous le soleil - avec beaucoup de scènes contemplatives, heureusement jamais gratuites, qui sont d'autant plus appréciables que l'esthétique du film diffère pas mal des nombreux précédents. Les décors sont splendides, vraiment éloignés des fonds classiques de films d'animation japonais, les touches de peinture hyper appuyées créent de véritables tableaux dans lesquels les personnages évoluent, un vrai bonheur. Ces passages contrastent agréablement avec les scènes -plus classiques chez Miyazaki- tout en aplat, aux formes très simples, quand il s'agit de traduire la vitesse (et vous verrez, avec le vent, on est servis).
Je parle beaucoup du visuel, et c'est bon signe, c'est qu'il reste des choses à dire sur le travail de Mr Miyazaki !
Il ne se repose pas sur ses acquis, bien que l'on retrouve sa patte sur de très nombreux détails, l'univers qu'il nous livre ici est vraiment propre à ce film, tant par le travail d'ambiance qu'au niveau des personnages, c'est quelque chose que j'ai vraiment apprécié.
Au niveau des mécaniques, un retour notable à cette esthétique si particulière à la Jodorowsky / Moebius qui était très présente dans ses premiers films et dont il s'était pas mal détaché. ♥
Si je devais mettre un mauvais point concernant les graphismes (mais si, pour prouver que je suis objective !), certains passages avec des intégrations de 3D font un peu tâche, mais ils sont rares et assez discrets pour que cela reste pardonnable.
Concernant l'histoire... je tourne autour du pot, j'omets volontairement d'en parler, tout simplement car j'ai peur de trop en dire - ou de mal le dire.
Il y a comme une impression de malaise à découvrir l'envers de l'Histoire, l'envers de cette guerre (le film se déroulant aux prémices de la 2WW) qui a tellement marqué l'Occident qu'il est facile d'occulter qu'elle a concerné ce pays de l'autre côté du globe. Il y a là quelque chose d'à la fois familier et déconcertant.
Le background est posé, je ne vous en dis pas plus.
"Le Vent se lève" est avant tout un hommage à Jiro Horikoshi, ingénieur d'aéronautique, père du tristement célèbre Chasseur "Zero". On a beau être dans la biopic, on n'en restes pas moins dans le registre onirique et romancé habituel, je ne suis pas encore sure d'adhérer ou de regretter ce parti pris.
Il y a un aspect de déresponsabilisation du personnage principal, doux rêveur, tout à sa passion, tant concernant la guerre que les problèmes personnels, qui me gène un peu. En à côté, on a une très belle construction toute en non-dits et en justesse qui est vraiment très belle.
Ma première pensée en sortant : je suis ravie que Miyazaki se soit attaqué à des personnages principaux adultes, en dehors de son registre fantastique habituel. L'aspect onirique du film sers tout bonnement de paratonnerre à son intensité dramatique, c'est fort, et on ne s'y attends pas forcément... bien joué.