Remarquable oeuvre finale
Voici donc l'oeuvre testament de Hayao Miyazaki. Le vent se lève (dont le titre est issu d'un vers d'un poème de Paul Valéry) est le dernier film du cinéaste japonais, pour le plus grand regret des fans et des cinéphiles en général. Car Miyazaki, c'était la certitude de voir encore des dessins animés faits un peu à l'ancienne. C'est aussi un homme qui a marqué le cinéma grâce à son imagination débordante, son onirisme de tous les instants et cette capacité de toucher bon nombre d'entre nous.
Pourtant, pour son dernier film, le cinéaste change complètement de sujet. Point de fantastique ou d'onirisme ici. Le sujet n'est autre qu'une biographie romancée du créateur du Zéro, ce chasseur japonais qui ne devait jamais revenir de ses missions.
Nul doute que le cinéaste a trouvé l'inspiration dans le personnage de Jirō Horikoshi pour y faire un constant parallèle entre sa carrière et celle du bonhomme. En effet, l'ingénieur est prêt à tout sacrifier, être un génial égoïste pour parvenir à réaliser l'avion de ses rêves. C'est d'ailleurs par de nombreuses séquences de rêves que l'on apprend à connaitre l'aspiration du personnage et son envie impossible de voler (il est myope). Mais il ne lâche jamais prise. Toujours acharné au niveau du travail, il va tout faire pour réaliser ses rêves.
Ad contrario, Jirō est aussi un homme qui doit vivre les pieds sur terre. Il rencontre Nahoko après un tremblement de terre avant de ne la revoir que bien des années plus tard. De là va naitre un amour aussi intense que fragile, en cause de la faiblesse de santé de la jeune femme. Cette dernière va pourtant accepter tout de son mari pour ne pas le freiner dans son travail, pour qu'il puisse justement atteindre son but.
L'oeuvre est souvent très juste, d'une émotion savamment bien distillée. Miyazaki est proche de la retraite, mais le bougre a encore de la clairvoyance. Les différentes séquences de rêve et surtout la fin sont d'une justesse sidérante.
Dans ce final, le héros remercie sa femme défunte pour lui avoir permis d'accomplir son rêve, mais aussi pour ce qu'elle lui a apporté, le véritable amour. L'oeuvre se termine par ce personnage disant merci alors que Caproni, personnage récurrent de ses rêves, l'invite à vivre une nouvelle vie. Le parallèle Jirō - Miyazaki est constant et c'est peut-être parce que l'on sait qu'il s'agit du dernier film du cinéaste qu'on ressort finalement ému de cette histoire.
Une histoire dont il y a encore énormément de choses à raconter, celle d'un héros finalement ambigu: égoïste pour atteindre son but, délaissant sa femme pour y arriver et créant des appareils qui causeront la mort de centaines de ses compatriotes ou d'hommes étrangers. Mais aussi celle d'un garçon à la gentillesse débordante, à l'altruisme sur certains éléments mais également reconnaissant de ce que la vie lui a apporté.
Un mot sur la technique enfin, qui est elle aussi remarquable. Les séquences de rêve ou dans les airs sont parfaites. Les couleurs toujours très justes et les détails foisonnent comme toujours chez Miyazaki.
A peine parti que l'homme laisse déjà un grand vide.