Coup de fil de mon fils : Maman, est-ce que tu.... bzzz... crrr... à la Cinematek...grrrzzz... six heures ?
Je me rends donc à la Cinematek, le même soir, à six heures, sans savoir du tout quel film je vais voir.
Premier Angelopoulos, pour moi. 13 ans d'Histoire de la Grèce contemporaine, a travers celle d'une troupe quasi-familiale de comédiens ambulants. 13 ans d'une Histoire quasi méconnue ici, en Belgique. 13 ans de tragédie (la guerre, la guerre civile et leurs conséquenses) ,et parfois de comédie (musicale, la comédie). 1939-1952...
La Grèce que nous montre Angelopoulos n'a rien d'un pays de carte postale. Pas de moulins de Mykonoss. Pas de ciel bleu ou de mer turquoise. Pas de champs d'oliviers frémissants sous un soleil de plomb. Pas de sirtaki (enfin... si : 2 minutes sur une plage). Pas de monuments historiques flamboyant dans un crépuscule doré. Pas de jeunes filles en robes légères.
Non, la Grèce d'Angelopoulos a des murs lépreux, un ciel de plomb, un sol neigeux, ou boueux parfois. Les flots y ressemblent à ceux de la Baltique. Et les personnages y voyagent vêtus de gros manteaux de laine (et même de fourrure). Est elle triste ? Pas vraiment. Mais elle est blessée, par la guerre, la politique, la division. L'étranger. L'adultère. Les passions. La mort.
Et elle est vivante. Malgré tout. Comme elle l'était il y a 3000 ans. Ce n'est pas par hasard que des personnages s'y appellent "Oreste" ou "Electre".
Angelopoulos nous offre un film superbe, humain. Il a l'art de nous montrer la guerre sans nous montrer de batailles, la politique au travers d'un show musical dans un resto branché. D'étranges plan-séquences nous font voyager dans le temps et le destin (ou le Destin... la Grèce, Oreste, Electre...) des personnages nous touche, plus par petites touches que par de grandes envolées lyriques.