Bernard Clavel, auteur du livre éponyme publié en 1965, n'apprécia guère l'adaptation qui fut faite par Denys de la Patellière un an plus tard.

En effet, le roman raconte la quête qu'un père, paysan aux confins du Jura, va entreprendre, seul, pour retrouver sa fille, Marie-Louise, partie deux ans auparavant pour travailler dans un salon de coiffure à Lyon. Tandis que le film décrit le voyage du père qu'accompagne l'instituteur du village, resté amoureux de Marie-Louise. Et c'est vrai que cette modification ajoutée à l'introduction de quelques personnages "presque" bienveillants, atténue beaucoup l'âpreté terrible du roman. Dans le roman, le père est seul, perdu face à une ville qui est ou devient odieuse, seul face à une vérité qui restera laide et sans espoir.

Je n'avais jamais vu le film mais connaissais bien le roman qui fait un portrait glaçant et inoubliable de ce paysan qui se refuse à croire l'impensable, à qui il faut mettre les points sur les "i" et qui se fera un devoir de garder pour lui ce qu'il a découvert.

Le film ne démérite pas non plus pour autant. D'abord pour la distribution qui est excellente ainsi que pour les dialogues "piquants" de Pascal Jardin.

Le rôle du père est assuré par un Fernandel qu'on n'aura rarement vu aussi grave. Le personnage est un homme simple, honnête et pétri de valeurs morales. Il colle bien avec ce qu'on sait de l'acteur unanimement considéré par la profession comme fidèle et fiable dans ses relations et n'ayant jamais donné prise aux potins ou aux scandales.

Le personnage de l'épouse est tenu par une Lili Palmer, formidable dans le rôle d'une femme pleine d'amertume, qui se déchaine contre Fernandel pour son manque d'ambition, sa faiblesse congénitale et son humanité. Mais son ambition pour sa fille qu'elle veut voir heureuse hors du trou "bouseux" jurassien peut s'avérer fort toxique …

"Il n'y avait qu'un homme de bon sur cette Terre et il a fallu que je tombe dessus"

Laurent Terzieff interprète le rôle de l'instituteur dans un duo surprenant avec Fernandel.

Oui, même si le propos dramatique du roman est atténué, le film n'est quand même pas mal du tout. D'un point de vue mise en scène, Denys de la Patellière oppose la beauté et le calme de la campagne jurassienne avec la ville trépidante et inhumaine dans les scènes tournées dans le vieux quartier Saint-Jean où on aperçoit quelques traboules … et des escaliers sans fin illustrant bien cette descente en enfer.


Créée

le 23 janv. 2025

Critique lue 20 fois

4 j'aime

1 commentaire

JeanG55

Écrit par

Critique lue 20 fois

4
1

D'autres avis sur Le Voyage du père

Le Voyage du père
greenwich
5

Le voyage du père (1966)

Il s'agit d'un film dramatique en couleur mettant en scène Fernandel dans l'un de ses derniers rôles. Une famille vit dans la montagne jurassienne dans une ferme isolée. Les images de la montagne...

le 10 déc. 2014

4 j'aime

1

Le Voyage du père
jlumo69
6

à découvrir

Un film à découvrir. Parce que c'est pas si souvent qu'on voit Fernandel dans un rôle pas comique. Parce qu'on y voit Lyon avant (avant Louis Pradel entre autre), parce qu'on espère y voir Marie...

le 5 juin 2021

1 j'aime

Le Voyage du père
NєσLαιη
7

Critique by NєσLαιη

Fernandel doit se rendre dans la grande ville de Lyon pour retrouver sa fille qui depuis à bien grandit. Seulement il va se rendre compte que sa destination ne va pas être tout un savoure. Déjà...

le 7 mai 2016

1 j'aime

Du même critique

L'Aventure de Mme Muir
JeanG55
10

The Ghost and Mrs Muir

Au départ de cette aventure, il y a un roman écrit par la romancière R.A. Dick en 1945 "le Fantôme et Mrs Muir". Peu après, Mankiewicz s'empare du sujet pour en faire un film. Le film reste très...

le 23 avr. 2022

26 j'aime

9

Le Désert des Tartares
JeanG55
9

La vanité de l'attente de l'orage

C'est vers l'âge de vingt ans que j'ai lu ce livre. Pas par hasard, je me souviens très bien qu'un copain me l'avait recommandé. J'avais bien aimé. Cependant, je n'ai jamais éprouvé le besoin de le...

le 7 avr. 2023

25 j'aime

33

125, rue Montmartre
JeanG55
8

Quel cirque !

1959 c'est l'année de "125 rue Montmartre" de Grangier mais aussi des "400 coups" du sieur Truffaut qui dégoisait tant et plus sur le cinéma à la Grangier dans les "Cahiers". En attendant, quelques...

le 13 nov. 2021

25 j'aime

5