La première fois que j'ai vu Anchorman, quand j'étais ado, j'avais trouvé ça nul. J'ai revu le film récemment, et mon avis a changé, si bien que durant ces dernières semaines, Anchorman 2 est devenu carrément un des films que j'attendais le plus. Il était sorti en salles aux USA à la fin de l'année dernière, mais ne devait être projeté en France qu'environ 6 mois après (et pour une fois, ce n'est pas la faute d'Universal, mais de Paramount !), jusqu'à ce que cette sortie soit annulée. Au Etats-Unis Anchorman 2 a même connu une ressortie au ciné, dans une nouvelle version bourrée de répliques alternatives.
En salles, il y a eu donc deux versions, une classée PG-13, une autre R. La version que je me suis procuré est exclusive au DVD, elle est unrated, et à mon avis correspond à une version longue de la PG-13.
Le premier Anchorman situait son histoire dans l’environnement funky des 70’s, mais cette suite évolue dans les 80s, et tire profit des particularités de cette époque. Alors que Ron Burgundy était auparavant confronté, à son grand dam, à l’émancipation de la femme, il est maintenant confronté à l’émergence de la culture afro-américaine, incarnée par une femme noire qui est son nouveau boss. Viré de son ancienne chaîne, Ron est embauché sur GNN, une chaîne novatrice passant des infos 24h/24.
Tout comme avec sa collègue du sexe opposé dans le précédent film, Ron va finir en couple avec son antagoniste, et va même rencontrer sa famille au cours d’un repas où il va essayer, à sa façon, de s’intégrer.
A son nouveau lieu de travail, Burgundy va aussi devoir côtoyer un jeune homme qui est l’étoile montante du journalisme ; une tentative, certainement, d’exploiter le fait que Ron Burgundy (et Will Ferrell) ne soit plus si jeune, et la nouvelle génération peut être une menace pour lui. Deux thèmes intéressants abordés vite fait avec ces personnages secondaires, mais pas vraiment explorés, c’est dommage.
C’est tout de même intéressant de voir comme les scénaristes font évoluer les personnages, en les présentant dans des situations nouvelles. Ils font de Ron l’inventeur de la télé-poubelle, et pendant ce temps, on a aussi droit à un Brick Tamland qui découvre l’amour, ce qui donne des dialogues incroyables.
J’ai eu des craintes en voyant au début du film qu’était repris ce gag où Ron exerce sa diction avec des phrases complètement débiles ("the tooth fairy’s exposed breasts made the child uncomfortable"), mais le jeu et l’imagination de Will Ferrell permettent de rendre ça encore drôle. L’acteur est vraiment doué pour trouver des phrases géniales débiles ; oui car je suis sûr qu’à chaque fois, ces phrases sont ses propres créations. La grosse dose d’improvisation dans les productions Apatow n’est pas un secret.
Parmi les pépites de ce Anchorman 2 : "When you got an ass like the north star, wise men are going to follow it", "I’m laughing like a ventriloquist’s doll !", …
Je finis par aimer les films de Will Ferrell pour les mêmes raisons qui me faisaient les critiquer encore tout récemment ; en août 2012, j’écrivais à propos de The campaign : « Les films avec Will Ferrel, à mon avis, ils sont toujours écrits de la même façon : "Le personnage se regarde dans le miroir, arrangeant sa coiffure.
[Insérer ici une réplique complètement débile et probablement improvisée par l'acteur, au sujet de ses cheveux]"
Ou alors un truc qui marche toujours : "[Insérer ici une réplique complètement absurde avec anecdote à caractère sexuel.]" »
Steve Carell arrive lui aussi à faire rire avec des situations d’une bêtise abyssale (Brick qui croit qu’il est mort…), qui m’auraient accablé dans un autre film. L’acteur est excellent en improvisation également, et finalement il m’a fait apprécier son personnage d’attardé surréaliste, que je n’aimais pas tellement dans le premier film, mais qui finalement lui permet d’avoir une grande liberté dans les répliques débiles qu’il peut inventer.
Anchorman 2 dure un peu plus de 2h, et il y a beaucoup d’intrigues et de sous-intrigues, trop peut-être, car certains éléments ne sont pas développés, et on sent qu’on passe souvent abruptement d’une scène à une autre, mais ça permet tout de même de dériver vers des situations aussi insolites que la perte de la vue chez un des personnages, ou l’apprivoisement d’un requin.
Il y a certaines situations qui font tellement déjà-vu, surtout celle où le héros, en pleine déchéance, se retrouve avec un boulot naze où il dit à un moment tout ce qui lui passe par la tête sous l'effet de l'alcool ; mais le film apporte son lot d’originalités dans des situations typiques. Après une tentative de suicide du héros, il y a une situation comique inédite tant elle est absurde ; je pense que personne avant n’avait pensé à créer un gag avec un truc aussi dénué de sens.
Le gag avec l’accident de la route aussi, en plus d’être hilarant, me semble n’avoir aucun équivalent dans les comédies vues à ce jour.
A l’inverse, il y a une scène où Ron ne peut s’empêcher d’éructer le mot "black" face à sa boss, qui est exactement comme une certaine scène de Goldmember…
Anchorman 2 reprend aussi pas mal de scènes du premier film ; que ça ait été par hommage ou par manque d’inspiration, ça aurait très facilement pu être navrant, mais finalement, loin de là. La scène du premier film où se battent les équipes de différentes chaînes de TV est reprise dans cette suite, mais elle n’est pas juste copiée, Adam McKay et Will Ferrell l’ont mise à jour pour en faire la séquence la plus hallucinante du film, où le mélange d’audace et de n’importe quoi surpasse tout ce qui a été vu dans les autres comédies de Ferrell.
J’ai continué à rire en repensant à cette séquence totalement WTF encore un bon moment après avoir fini de regarder le film.
Anchorman 2 est peut-être encore mieux que le premier film. On atteint un nouveau niveau dans la connerie, et pour une fois, je dis ça en bien.
En tout cas, je regarderai assurément la version alternative R-rated.
EDIT 03/04/2014 :
Ca fait à peine plus de 2 semaines que j'ai vu la version unrated d'Anchorman 2, mais j'ai tenu à ne pas trop tarder pour voir l'autre version R-rated, afin de pouvoir comparer.
Pour chaque production Apatow, les DVD comportent un ou deux bonus nommés "line-o-rama", qui sont une succession de répliques alternatives improvisées par les acteurs.
Avec Anchorman 2, on passe à un niveau bien supérieur, en consacrant à ces improvisations un film entier, de presque 2h30, soit plus long que le film de base !
Je trouvais le principe déjà hallucinant, mais j'ai encore été un peu plus surpris en découvrant dans cette version alternative une intro différente, et en constatant le nombre de répliques différentes.
Bon, je ne sais si c'est parce que j'ai déjà vu le film une première fois, mais j'ai trouvé cette version R-rated un peu moins drôle que la unrated, mais au moins ce n'est pas comme avec Wake up Ron Burgundy, où j'avais vraiment l'impression d'avoir droit aux restes un peu pourris d'un bon repas (ça doit être Ron qui m'inspire cette métaphore absurde, même si je n'ai pas son talent).
Il y a des scènes excellentes qui, peut-être juste pour ne pas proposer la même chose, ont été réduites ou montées de façon moins drôle. On perd l'excellent gag des "ladykillers", la scène de l'accident dans le van est carrément plus courte et moins délirante, et le gag de la répétition de "I'm blind !" marchait beaucoup mieux dans la version unrated.
Il y a tout de même, bien sûr, des répliques alternatives amusantes. Ce qui est fort avec Ferrell, c'est qu'il est capable de dire une absurdité sortie de nulle part, et développer l'idée tout seul, sans l'aide des autres acteurs (je pense à la métaphore de la pisse de cheval, à partir de laquelle il va très loin).
Et il y a de nouvelles scènes dont l'ajout est très appréciable : on apprend où était Brick durant son absence, il était chasseur de prime et a eu 6 enfants avec une femme hawaiienne, on apprend que Burgundy a refusé de bosser avec de jeunes journalistes comme Letterman, et on a droit à un numéro musical qui inclut la chanson "Gay for a day" (mais c'est moins fun qu'il n'y paraît, dit comme ça).
Par contre, même en version longue, on ne développe pas mieux la relation de Ron avec son fils, et on n'exploite pas davantage le thème de la corruption des media.
Finalement je suis content d'avoir vu la version unrated en premier, car elle est nettement mieux.