"Lenny" c'est le portrait d'un homme. Un homme jusqu'au-boutiste, qui se battit de toutes ses forces pour la liberté d'expression et contre l'hypocrisie de l’Amérique bien-pensante des années 60. Un homme dont l'arme fut le rire et qui posa son regard acéré sur ses contemporains. Tout d'abord comique médiocre, il s'affirme peu à peu comme un satiriste et un improvisateur génial. Sa première arrestation pour obscénité le poussera à se battre contre cette censure. C'est dès lors, les minutes de ses procès qu'il tourne en dérision. La persécution subit, la présence permanente des autorités, les procès à répétition, l'injustice des tribunaux, tout concourt à le rendre de plus en plus amer, écorché, vindicatif, cynique et révolté. Obsessif au point de compulser tout les documents juridiques à sa disposition, il ne trouve le repos de l'esprit que sous les effets anesthésiant d'une drogue qui aura finalement raison de lui.
Cet humoriste, c'est Dustin Hoffman qui l'interprète dans ce qui est l'une de ses plus belles prestations. Il ne ressemble pas physiquement à Lenny Bruce, sa voix ou sa façon de parler n'est pas une tentative d'imitation, mais pourtant il incarne férocement l'énergie, la passion, la révolte qui animait certainement cet homme.
Bob Fosse nous offre ici un portrait qui évite de tourner au panégyrique. Entrecoupé de témoignages (faux documentaire) de la femme, la mère et l'agent de Lenny Bruce, et de quelques moments de vie, c'est dans la fumée des cabarets et sous les lumières d'un spot (superbe travaille de photographie en noir et blanc) que Bob Fosse nous révèle totalement à la fois le côté héroïque et les faiblesses de cet homme. Lenny Bruce n'était ni un saint, ni un martyr plutôt un Don Quichotte des temps moderne, idéaliste, égoïste et parfois irraisonné dont l'excès en tout fit sa gloire et sa déchéance.