L'animation stop motion est un art complexe, un véritable art à part entière du cinéma d'animation, qui fascine autant qu'il a su me déranger ces dernières années. S'il y a effectivement eu de très belles propositions avec des courts métrages comme Mémorable ou Négative Space, les long métrages d'animation en stop motion ont le don de me décevoir chacun à leurs manière. Que ce soit parce que la stop motion est utilisé comme centre d'intérêt principale du film, éclipsant la qualité de l'écriture (Interdit aux chiens et aux italiens, La traversée), ou bien en n'assumant pas la physicalité de la stop motion pour aller vers de la quasi 3D (à l'image des films du studio Laïda qui arrive à accoucher de films d'animation de plus en plus débile dans cette démarche jusqu'à son récent Monsieur Link qui est une honte sous plein d'aspect), rare sont les films récents à coupler stop motion et qualité cinématographique. Malgré tout, l'espoir fait vivre, et s'il y a un lieu où l'animation est la plus vivante, c'est le festival d'Annecy. Cela tombe bien, cette année a été sélectionné un long métrage en stop motion, The Inventor (Léo en français) et on connait la capacité du festival à rassembler le meilleur du cinéma mondiale... pour quel résultat ?


Le film déborde de créativité et ne va pas à lésiner avec les moyens. Il y a des variations malignes dans l'animation afin d'illustrer des parties plus lyriques et abstraites, et même dans la technique stop motion, on sent une volonté de retranscrire des thématiques du film à travers l'animation. Le film parle de transmission de connaissance, et apprendre à laisser quelque chose derrière soi pour qu'on se souvienne de nous lorsqu'on ne sera plus là, et il est question de rendre accessible la connaissance par l'art (on y reviendra après). C'est pour cela, en parti, que le design des personnages va pour adopter une forme de minimalisme qui se rapprocherait du croquis. On le voit notamment autour des visages des personnages qui sont constitués de ronds, comme Léonard qui est constitué d'une boule et d'un ovale pour la barbe, pour simplifier l'anatomie du personnage et enseigner la manière de représenter un crâne barbu. Lorsque les personnages ont un design plus travaillé, il y a aussi la volonté d'expliquer comment est animé et représenté le personnage, même complexe. On a le représentant de la papoté (le pape ? j'avoue ne pas avoir bien compris, en tout cas il représente le christianisme et est fier que Michel-Ange peigne son plafond), qui a une tête assez imposante, et qui parle avec une mâchoire techniquement détaché de la bouche. A l'image d'un film comme Anomalisa, le film ne va pas cacher la facticité de la marionnette en ne mettant pas de pâte à modelé autour de la bouche pour faire l'illusion, mais va comme pour enseigner comment fonctionne la marionnette. Le film est très créatif et est un plaisir à voir pour ça... plus que par amour de l'écriture.


L'histoire est bien écrite quoi que très classique dans sa forme. Léonard subit l'égo des plus riches, doit leur apprendre à apprécier des choses subtiles comme l'art ou la science, et on suit ses déboires avec la papoté qui veut l'excommunier, et le roi de France qui n'a pas les clefs pour apprécier la science de Léonard. Cela amène des scènes drôles lorsque les assistants de Léonard doit trouver des sujets de testes pour son étude de anatomique du corps humain (chose considéré comme de la profanation), ou encore des scènes émouvantes lorsque Léonard est mis dos au mur, seul au monde, et doit se battre mentalement pour trouver la force de finir ses projets. Le soucis est que le film manque grandement en finesse et en subtilité pour raconter son récit. On a souvent des répétitions de schéma assez cartoonesque pour faire comprendre que le roi de France n'est pas content que Léonard ne fasse pas ce qu'il veut, ou même la présence de partitions musicales chantés, qui parfois purement inutiles. On y voit une volonté presque désespéré de vouloir parler à un très jeune public, et de tout décomplexifier, presque à l'excès. Cela rentre très vite en contradiction avec les intentions même du film, dont le thème principale est la transmission de connaissance, même si celle-ci ne rentre pas dans le canon de la pensée populaire. Qu'il y ait une pudeur lorsqu'il s'agit de représenter les cadavres disséqué par Léonard dans son labo, c'est normal et c'est très malignement fait, mais cela ne justifie pas une certaine infantilisation du public. Il n'en reste pas moins un film sympathique avec de très belles idées intelligente, dommage que celle-ci soit parfois gâché par des artifices parfois bête.


11,75/20


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Youdidi
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le 1 oct. 2023

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