Depuis quelques temps, Quentin Tarantino pense à arrêter sa carrière de réalisateur avec dix films. Comme de juste, il boucle avec son huitième film une œuvre qui évoque les 7 précédentes tout en lui offrant une densité inédite.


Au premier abord, il semble évident que Quentin Tarantino revient au western, l'époque et les personnages s'y prêtant naturellement. Mais de près, The Hateful Eight va beaucoup plus loin que ça. Le metteur en scène emprunte une voie inattendue tout en croisant celles qu'il a déjà parcouru.
- La quasi-unité de lieu rappelle Reservoir Dogs
- Le découpage en chapitre évoque Pulp Fiction ou Kill Bill (la structure non-linéaire en moins)
- L'auberge fait évidemment penser à Inglorious Basterds
- Le contexte est proche de Django Unchained.


Sur le papier, toutes ses similitudes passeraient pour du rabâchage et affaibliraient le film. Mais avec l'audace de Tarantino, elles deviennent des forces qui amplifient sa réussite. Car même si certains motifs récurrents apparaissent (la violence ou la vengeance), ils servent une intrigue beaucoup plus profonde et imprévisible.
L'ambiance de western se mélange habilement avec celle du thriller et enfin de l'horreur.
L'ombre de The Thing de John Carpenter plane sur une bonne partie du film et on n'est pas étonné d'entendre deux morceaux tirés de sa bande originale. C'est d'ailleurs le même Ennio Morricone qui signe l'excellente musique de The Hateful Eight.
Tarantino ne gâche pas une seule minute sur les 3 heures que dure son nouveau long. Patient mais rigoureux, il distille exposition, tension et rebondissements avec une précision remarquable. Le cinéaste n'a également rien perdu de sa verve en ce qui concerne les monologues/dialogues. Et pour s'assurer de leur efficacité, il s'est entouré d'un authentique "Tarantino All-Star".
Le trop rare Kurt Russell (présent dans Deathproof) irradie de charisme bestial en John Ruth.
Muse attitrée du cinéaste (présent dans presque tous ses films), Samuel L.Jackson trouve l'un de ses plus beaux rôles en Major Warren.
Après Reservoir Dogs et Kill Bill Vol.2, Michael Madsen renoue avec Tarantino et compose un réjouissant Joe Gage.
Également acteur dans Reservoir Dogs ou Pulp Fiction, Tim Roth est un vrai délice en Oswaldo Mobray.
Puis Walter Goggins (déjà crédité dans Django Unchained) trouve enfin un rôle à la mesure de son talent avec Chris Mannix.
Et Bruce Dern -revenu de Django... aussi- excelle dans le manteau du général Smithers. Les nouvelles têtes ne sont cependant pas en reste.
Jennifer Jason Leigh n'est peut être plus une révélation, mais on la redécouvre en Daisy Domergue et ça fait plaisir. Quentin Tarantino signe peut être là son film le plus abouti.
À n'en point douter son opus le plus sombre et pertinent. Car derrière le mélange des genres se cache une réflexion sur une Amérique et son rapport à la violence. Une violence qui n'est plus un effet de style mais une traduction brutale des rapports qu'entretiennent les individus et leur propension à l'utiliser pour régler les problèmes entre eux.


Le film accuse une ou deux longueurs et je ne suis pas convaincu par l'utilisation de la voix-off (ce qui atténue le choc de la deuxième partie, à mon goût). Si The Hateful Eight semble clore un cycle dans la filmographie de son auteur, on ne peut que trépigner d'impatience à l'idée de voir où ces deux prochains (et derniers?) films l'emmèneront.

ConFuCkamuS
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le 25 juil. 2019

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