Les Agneaux est le troisième film de fiction de Marcel Schüpbach, réalisateur suisse né en 1950. Adapté du roman homonyme de la suissesse Ania Carmel, ce film dur décrit sans fioriture la dynamique amour/haine qui travaille au corps une famille installée au cœur du Jura français.

Daniel, 15 ans, et Marie, 14 ans, vivent sous la coupe d'un père brutal (Richard Berry), qui ne peut exprimer son amour autrement que par la violence. Adepte d'une éducation à la spartiate, il épuise ses enfants et ne ménage pas non plus sa femme (Brigitte Roüan), pourtant gravement malade. Homme des bois égaré dans la ville, il ne comprend pas qu'on aille mal. Lui n'est jamais malade. Il rugit, éructe, folâtre allègrement avec des jeunes filles au vu et au su de ses enfants pendant que sa femme gravement malade git à la maison, murée dans le silence. Elle ne pèse plus qu'une quarantaine de kilos, ses joues sont creusées, ses yeux dévorés par la fièvre. Mais en rupture de la société, il lui refuse les soins, les médecins, l’hôpital.

Il n'arrive à faire passer son amour que par la tyrannie et la terreur, et considère que ses enfants, « ses agneaux » comme il les appelle, doivent en tout, pouvoir se débrouiller tout seuls. Il les poursuit d’un amour excessif et dominateur et les dresse à se battre pour soi-disant les aguerrir, les réveillant au milieu de la nuit pour les précipiter l'un contre l'autre comme des coqs de combat.

Confrontés à la tyrannie brutale et vulgaire de ce père détraqué, les deux ados partagés qu’ils sont entre la fascination et le rejet, se défendent comme ils le peuvent, déployant toute l’astuce des opprimés pour flouer leur géniteur. A force de se regarder l'un l'autre, Daniel et Marie, ne savent plus très bien qui des deux est Daniel, qui des deux est Marie. Fusionnels, ils pensent, ils parlent, ils écrivent de la même manière. Ils sont frère et sœur, plus semblables que des jumeaux.

Le jour où la mère épuisée décède, les enfants s’enfuient. Une errance qui les enverra vers des réalités plus cruelles, où l'amour du père, quel qu'il soit, sera leur planche de salut.

kinophil
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Cinéma SUISSE

Créée

le 13 nov. 2022

Critique lue 29 fois

2 j'aime

2 commentaires

kinophil

Écrit par

Critique lue 29 fois

2
2

Du même critique

The Outrun
kinophil
8

Critique de The Outrun par kinophil

Cinq ans après avoir reçu l’Ours d’argent à la Berlinale pour Benni, où elle traçait le portrait d’une fillette colérique, négligée et violente, ballottée d’un foyer d’accueil à l’autre, la...

le 6 oct. 2024

12 j'aime

Et la fête continue !
kinophil
5

Qui trop embrasse mal étreint

Le dernier film marseillais de Guédiguian, « Gloria Mundi », dressait en 2019 un constat amer, désespéré et totalement déprimant sur la société libérale, gagnée par le repli sur soi. Le cinéaste y...

le 18 nov. 2023

11 j'aime

3

Sweet Thing
kinophil
8

Petits fugitifs dans la Nuit du Chasseur

Film indépendant dans son expression la plus authentique et ce que le genre offre de meilleur : quelques milliers de dollars, beaucoup d'énergie et d’amour du cinéma, tourné avec une petite équipe,...

le 14 juil. 2021

10 j'aime