- Voilà maintenant un an que Nicolas Cage a basculé du côté obscur de l'actor's studio. Un an que Nico a trouvé sa nouvelle voie, artistiquement comme spirituellement. Un an que Nico le foufou, Nico l'allumé a tourné son premier blockbuster d'action sous la houlette de Michael Bay, The Rock. Le gars qui, autrefois, faisait le kéké chez les frangins Coen, frôlait la cirrhose pour les besoins de Leaving Las Vegas ou ambitionnait de devenir le gendre idéal grâce à une poignée de comédies insignifiantes, a décidé de devenir un action hero mono expressif capillairement hors de ce monde et de cette galaxie. Fuck les Oscars, fuck la reconnaissance de ses pairs, fuck la cohérence et la logique, et bonjour aux navets imbuvables, aux nanars transcendantaux et aux moumoutes de la mort.
Bien décidé à remplacer Lorenzo Lamas au pied levé, Nico entre donc dans la peau d'un ranger bien comme il faut, si l'on excepte ses tendances à péter de la glotte dès que son aryenne de femme se fait gentiment palper le cul, alors que c'est quand même son boulot de serveuse qui veut ça. Bref, Nico fait de la taule, se laisse pousser barbe de trois jours, tignasse graisseuse et marcel immaculé, écrit à son colibri en songeant au jour béni où il rencontrera enfin sa fille qu'il n'a jamais vu (bah oui, il a cassé de la glotte, faut suivre !) et où il pourra lui offrir ce joli lapinou en peluche parce que les clopes des copains, c'est bien beau mais c'est pas un cadeau pour une fillette de sept ans.
Mais comme nous sommes dans un gros film d'action avec plein de pépettes dedans et qu'il faut offrir au ricain king size ce qu'il est venu voir, Nico va forcément se retrouver dans les emmerdes jusqu'au scalp, obliger de babysitter tout un groupe de gentils taulards ne demandant qu'à s'enfuir à Las Vegas pour violer, piller, tuer ou voter républicain. Face à un casting de malade mental (John Malkovich; Steve Buscemi; John Cusack; Colm Meaney; Danny Trejo; Ving Rhames...), Nico va donc traverser le film en délivrant sa bonne parole (en gros, "c'est pas bien d'être méchant, de postillonner, de violer, de toucher à mon lapinou"), à chercher de l'insuline pour son copain noir et surtout, à préserver de la cellophane le précieux cadeau d'anniversaire, tout en conservant la même expression et un ton monocorde pour chaque réplique.
Shootée avec une relative efficacité par Simon West (qui allait fister quatre ans plus tard les gamers du monde entier avec son atroce adaptation de Tomb Raider), Con Air est donc une sacrée bouse, totalement conne, limite puante, se la jouant démocrate alors qu'elle est clairement échappée de l'ère reaganienne et bourrée à ras-bord de bons sentiments dégoulinants et patriotiques. Mais c'est exactement pour toutes ces raisons que Con Air est cher à mon coeur, immense foutoir régressif à mourir de rire avec une bande de potes braillards et de la binouze à foison.
Monument de connerie tout entier voué à la gloire capillaire de ce grand fou de Nicolas Cage, Con Air est un des derniers représentants d'une époque où l'on n'avait pas peur de passer pour un gros con et où on ne foutait pas du CGI baveux partout sur l'écran. Une époque exceptionnelle où l'on pouvait encore voir de grands acteurs cachetonner sans honte sur écran géant. Pour tout cela, Con Air est un film de merde, oui, mais un beau.