Oeuvre mineure et assez peu estimée de la filmographie de Louis Malle, "Les Amants" a au moment de sa sortie causé une délicieuse et sympathique polémique à propos de son sujet, celui d'une femme mariée qui va s'énamourer d'un inconnu le temps d'une nuit. Il y a comme des airs du grand cinéma d'auteur italien de ces belles années-là. Jusqu'au bout, j'avais envie de l'aimer ce film car l'histoire avait tout ce qu'il fallait pour nous remuer les tripes.
Hélas, chaque minute passant m'a amené à poser un regard d'une amère lucidité alors que tout démarrait ma foi correctement. Jeanne Moreau est toujours aussi talentueuse et elle s'entoure d'un casting assez fort, jusqu'au garagiste même. On se laisse prendre aussi au jeu de la voix-off dont les répliques sont belles et nuancées. L'image est ravissante. Non vraiment, je voulais dire fièrement "J'ai aimé Les Amants", surtout à l'aune de l'idyllique transition toute en finesse de nos deux tourtereaux sur une barque se baladant le long d'une eau scintillante. Le désir devient réalité. Et puis, l'impardonnable surgit.
Qu'on se le dise, je ne suis aucunement hermétique au mélodrame amoureux. Bien au contraire, je peux très vite tomber sous son charme. Qui n'a pas fondu devant des bijoux comme "La Valse dans l'Ombre", "Lettre d'une Inconnue" ou encore "L'Heure Suprême" ? C'est un peu le propre de ce choix de récit. Quand c'est bien fait, ça nous fait rêver. Il n'y a pas matière à être réaliste mais bien à rendre l'espace d'un instant l'amour impossible tangible. Sauf que "Les Amants" en fait beaucoup trop. La dégringolade se fait sous une avalanche de phrases mielleuses, convenues et toutes plus clichées les unes que les autres que n'auraient pas reniées les pires caricatures bollywoodiennes. Jamais on y croit. Tout se déroule de manière robotique, du jeu d'acteur aux scènes même. Le mari laisse partir sa femme presque en se grattant les burnes, tandis que sa meilleure amie est contente pour elle.
Il y a une limite à ne pas franchir sur ce terreau sensible et y parvenir, c'est rendre son film niais et vomitif.