En cette période de fin d'année, voici un film idéal pour Noël, car il met en joie, c'est du cinéma de détente pure qui "lave les yeux", je le revois souvent, c'est le moment propice, il est très bien placé dans ma liste des "Films qui rendent heureux".
La légende merveilleuse et le personnage charismatique de Robin des Bois ont inspiré de nombreuses versions cinématographiques, aussi bien à Hollywood qu'en Angleterre, et même à Cinecitta. Mais en 1938, le Robin des Bois réalisé par Michael Curtiz reste non seulement la production Warner Bros la plus coûteuse (un budget colossal pour l'époque de 1 600 000 dollars, dont la moitié pour la photo couleur due à la spécialiste du Technicolor, Natalie Kalmus), mais surtout la plus flamboyante version de l'histoire du cinéma. Elle glorifie la célèbre légende sans trop s'encombrer de véracité historique, avec un brio exceptionnel, et reste un modèle du film d'aventures médiévales.
Commencé par William Keighley, le tournage fut jugé trop lent par le studio qui le fit remplacer par Michael Curtiz, spécialiste des films d'action ; il venait de diriger Errol Flynn dans Capitaine Blood et la Charge de la brigade légère, ce fut donc une osmose totale entre ce réalisateur tyrannique mais efficace, et la star alors spécialisée dans les rôles d'aventuriers de légende à cette époque. Le film contient tous les éléments qui ont servi à forger le mythe de l'homme en vert : gros château, tournoi d'archers, scène d'amour romantique au bord des fenêtres, bagarre joviale au bâton, glissade le long des tentures pour échapper aux soldats, perfidie des méchants, joyeux compagnons, ripailles festives en forêt de Sherwood, duel final légendaire... bref tout un assortiment magnifié en multiples morceaux de bravoure et scènes réjouissantes (le tournoi d'archers, l'intrusion de Robin au banquet de Nottingham, l'apparition de Richard Coeur de Lion au milieu des proscrits de Sherwood, le duel final étant d'admirables moments de cinéma).
Il y a aussi un casting étincelant, avec la morgue de Basil Rathbone (un inoubliable Gisbourne et par ailleurs fin escrimeur), la grâce de Olivia de Havilland qui campe une douce Lady Marian, la rouerie de Claude Rains en Prince Jean mielleux, sans oublier l'humour bon enfant d'Alan Hale en Petit-Jean, Eugene Pallette en Frère Tuck ou Una O'Connor en servante dévouée... et bien sûr la prestance d'Errol Flynn qui s'amuse comme un fou dans ce rôle de bravache impétueux ayant revêtu collants et pourpoint verts et le petit chapeau à plumes.
Son duel frénétique avec Rathbone traversant les immenses salles et escaliers du château de Nottingham, reste un grand moment, le réalisateur le filmant par endroits en ombres expressionnistes sur les murailles massives de ce gigantesque décor. L'action est sans cesse trépidante, et la fabuleuse partition aux notes virevoltantes d'Erich-Wolfgang Korngold accompagne tout ceci en un ballet merveilleux photographié par un Technicolor chatoyant des tout débuts de la couleur.
Revoir ce film me procure à chaque fois une immense joie, c'est un chef-d'oeuvre incontesté qui possède tout le charme du vieil Hollywood, un véritable enchantement qui au fil des années n'a rien perdu de son éclat, et dont les nouvelles générations peuvent à leur tour admirer le panache.